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INSECTICIDE INVOLONTAIRE

par Claire Sibille

publié dans Le quotidien c'est pas banal !

INSECTICIDE INVOLONTAIRE

Billet d’humeur triste et résignée

 

Résumé : Je ne veux pas vivre dans un monde sans insectes.

 

Je ne veux pas vivre dans un monde sans insectes. D’ailleurs la vie y sera-t-elle encore possible ?

J’en ai souvent parlé, dans des articles sur ce blog et ailleurs, dans des recueils, dans des romans. Depuis longtemps. Un des drames du temps qui passe est de voir des sujets redevenir d’actualité, alors que rien ou si peu ne change. Comme si, par exemple, c’était nouveau la disparition des insectes. Alors que dans un article il y 20 ans je constatais déjà la triste propreté des phares et des parebrises en été. Alors que mon père souffrait déjà d’éco-anxiété dans les années 70.

Mais cette semaine, l’actualité nous dit que 70% des insectes ont disparu. À quel pourcentage les personnes qui décident de l’usage ou non des pesticides vont-ils sortir du déni ? 99,99% ? Jamais ?

Alors cela m’est d’autant plus douloureux de contribuer malgré moi à cette disparition. Une petite bête que j’écrase car je ne l’ai pas vue. Une araignée passée dans l’aspirateur avant que je n’ai eu le réflexe de l’attraper pour la mettre à l’abri. Et hier un adorable scarabée qui s’est fiché malencontreusement dans la rainure d’une baie vitrée. Un scarabée sacré en plus. J'ai commis une profanation. Voire un déicide si j'en crois la mythologie égyptienne.

Peut-être est-il le dégât collatéral de la guerre que j’ai dû mener il y a quelques jours contre une bonne dizaine de frelons asiatiques, des femelles voulant construire leur nid chez moi. J’ai fini par utiliser une bombe. Promis, je ne le ferai plus. Ou j’essaierai. Car il y en a beaucoup, elles peuvent faire du mal à des personnes dont je suis responsable et les alternatives sont délicates. Par exemple celle qui consiste à attraper le frelon dans un bocal et le mettre au congélateur. Je ne suis pas sûre d'en être capable. Mais j'essaierai.

Il peut y avoir aussi une mouche ou un moustique, les mieux programmés pour la survie semble-t-il, que je m’autorise à tuer. Donc si je commets des insecticides involontaires, il y a aussi des meurtres (mal) assumés. Il faut quand même qu’il y en ait beaucoup et qu’elles représentent un danger effectif. Essaie de me rassurer ma conscience.

Ces meurtres me meurtrissent … Car où est la limite ?

Je vois passer une info sur la biodiversité dans les cimetières, de campagne mais aussi de ville. Petits mammifères, oiseaux, insectes …

C’est peut-être le dernier endroit où l’on pourra rencontrer ces vies minuscules.

Dans les cimetières.

Rencontre au sommet, voir la vidéo ci-dessous pour rire un peu …

Rencontre au sommet, voir la vidéo ci-dessous pour rire un peu …

Scarabée sacré

Scarabée sacré

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PAS DE FUMÉE SANS ... FOI ?

par Claire Sibille

publié dans Cette société - c'est la notre !

Pas de fumée sans … foi ?

Billet d’humeur autour de la mort de François, le pape.

Résumé : La mort du pape, comme celle de certaines personnes devenues des symboles de leur vivant, peut interroger les valeurs, le parcours de vie, et, pour nous qui sommes que nous le voulions ou non imbibés de millénaires de christianisme, notre rapport à cette culture, je dis culture, j’analyserai d’autres mots dans le cours de l’article. En effet, à l’heure où des hommes s’autorisent à faire disparaître des mots et des livres dans un pays supposé démocratique et libre comme les États-Unis, comprendre l’histoire et le sens des mots devient vital. Car quelque chose qui n’est plus nommé disparaît de la conscience collective. Mais pas du réel.

Le pape est mort. Comme pour les JO 2024, une grande vague émotionnelle à laquelle je suis toujours sensible, c’est pour ça que j’aime les manifs et les concerts, a balayé la planète. Ou plutôt la partie de la planète sensible à ces moments d’appartenance collective, quelles que soient leur origine. Mais surtout disponibles pour les vivre, car ne devant pas protéger leurs enfants d’une bombe tombant sur leur maison ou d’un feu de forêt. Il est néanmoins notable que les catholiques sont loin d’être les seuls concernés.  

Je n’ai aucune tristesse pour François. Je l’imagine accueilli par une ribambelle d’anges. Beaucoup, handicapés, n’ont qu’une aile. D’autres, SDF, n’arrivent pas à trouver un nuage pour se poser. Homosexuels ? Trans ? Inutile. Les anges n’ont pas de sexe, c’est bien connu et donc le genre ne les intéresse pas, les veinards.

Je vois plutôt sa mort comme celle d’un grand arbre, qui, en s’effondrant, donne vie à des myriades de petites et moins petites bêtes. Je rêve d’une humanité qui, quand elle meurt, nourrit un tas de compost et de terreau plutôt qu’une décharge publique à ciel ouvert …

Pas de tristesse donc, mais de la tendresse pour ce pape qui a su affirmer des valeurs, mais surtout montrer une empathie, une tolérance et une humilité, qui manquent cruellement non seulement dans l’Église catholique mais dans le monde. Cette réflexion est d’autant plus importante dans le contexte du dévoilement, encore, des abjections pédocriminelles de beaucoup de tenants de l’institution catholique. Elle est loin d’être la seule et l’impact de cette violence, patriarcale et pathologique, appliquée aux enfants dès le plus jeune âge, construit une partie trop grande de notre société.

Car si la résolution de traumatismes précoces, grâce à l’investissement de la personne dans de coûteux chemins thérapeutiques et résilients, renforce notre humanité et la grandit, la répétition de traumatismes non résolus accélère sa destruction[1]. C’est ce que nous voyons tant au niveau individuel à travers les VSS, que collectif, comme, parmi de nombreux exemples, ce qui est en train de se passer entre le gouvernement israélien et le peuple de Gaza.

Les critiques sur ce pape ont été assez limitées, même du côté des deux extrêmes de notre grille politique, les plus virulents, les plus rapides à désigner l’autre comme ennemi ou coupable. Mais le problème n’est pas là.

Le problème c’est ce qu’un philosophe et sociologue, Gérard Rabinovitch, a nommé la « Société somnambule ». Le somnambule croit être éveillé mais il dort. L’addiction aux écrans, l’avidité insatiable des puissants, la tyrannie économique et patriarcale, la menace des guerres et les conséquences déjà si désastreuses de la catastrophe climatique nous rendent somnambules, car la réalité est bien trop inquiétante pour pouvoir lui faire face. Alors tel un enfant qui ne veut pas voir l’ogre, nous mettons nos mains devant nos yeux en espérant qu’il va ainsi disparaître.

Dans le meilleur des cas nous construisons avec d’autres une niche écologique où nous sentir utiles et créateurs le temps de notre vie, et nous sortons de l’impuissance. Dans la plupart de cas, nous nous tournons vers nos besoins et désirs en tentant de survivre au mieux. Dans le pire des cas, nous désignons un bouc émissaire comme cause de tous nos désagréments. Liste non exhaustive et cumulable en fonction des moments…

J’ai traversé plus jeune pas mal de périodes mystiques (myste : celui qui a le doigt sur la bouche, qui ne peut partager son expérience intérieure). La religion chrétienne, entre autres, a pu faire sens, surtout à travers certains de ses saint.e.s, comme François d’Assise ou Thérèse d’Avila. J’ai eu des parents œcuménistes, alors Bouddha, Mahomet et tous les maîtres zen et chamans du monde étaient également bienvenus à la table. Mon premier écrit publié, j’avais 7 ans, est d’ailleurs un poème pour mon parrain, prêtre à Bidache, qui était tombé malade. Il a figuré dans le journal paroissial …

Comme dans d’autres domaines de mon existence, y compris la psychothérapie, l’institution et ses dérives m’a séparée de toute velléité d’appartenance à un quelconque mouvement, après bien des essais-erreurs. Intolérance ? Peut-être. Mais je n’ai qu’une vie, et je préfère contempler « Dieu » (étymologiquement, la lumière du jour) dans les merveilles de la nature, de l’art ou de certaines relations humaines, plutôt que subir le dogmatisme patriarcal et les abus de pouvoir. J’en suis plutôt heureuse et sans regret … J’ai rencontré des personnes merveilleuses dans certaines retraites, je pense par exemple à des sœurs dominicaines en Alsace, à un moment pénible de ma vie, dont l’ouverture d’esprit et l’empathie étaient réelles et palpables. Mais tant d’autres expériences opposées !

Alors dans ce contexte, les personnes qui essaient de relier plutôt que de séparer, comme l’a été le pape, y compris dans son dialogue avec d’autres religions, sont plutôt des bénédictions (étymologiquement : bonnes paroles).

Un peu d’étymologie encore.

- Religion vient de : religare, ce qui relie.

- Diable vient de : ce qui désunit, sépare, qui inspire la haine ou l’envie.

- Spirituel renvoie à ce qui est immatériel, opposé au corps.

D’où mon agacement face à ce terme séparatiste.

- Sacré va dans le même sens. Il désigne ce qui est séparé de la vie quotidienne des hommes représenté par un espace clos, le temple. Il s’oppose au profane, ce qui est devant le temple, c’est-à-dire la plus grande partie de nos vies. Or nombre de traditions et de pratiques montrent que l’essentiel est dans l’intention et le lien, dans le présent du Vivant. « Va laver ton bol » disent certains maîtres aux disciples obsédés par l’éveil.

Il y a des gens qui relient, et d’autres qui séparent. Des mots aussi. Et les termes qui séparent sont nombreux dès qu’il s’agit de foi. Faisons attention aux mots que nous employons, ils désignent notre réalité. Je vote donc pour une religion profane et intégrative, incluant le corps, la vie quotidienne, et l’ensemble des vivants !

Et j’espère que, sur les ailes de la fumée blanche, nous parviendra un tisserand ...


[1] C’est ce que j’ai développé dans ma nouvelle, Demain les mouches, genèse d’un psychopathe, publiée dans le recueil « Écrire contre la haine » au profit de la LICRA, si vous voulez faire une BA tout en lisant des nouvelles remarquables.

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