Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Les émotions n'ont pas la vie facile

par Marie-José Sibille

publié dans Cette société - c'est la notre ! , La psychothérapie - de quoi ça parle

Les émotions n'ont pas la vie facile

 

En 2018, les émotions n'ont toujours pas la vie facile.

Maltraitées, interdites, utilisées par des animateurs médiatiques pervers, ou encore humiliées par de doctes messieurs et trop souvent mesdames qui les opposent à la raison - entendez par là vos émotions et leur raison - manipulées par des vendeurs de paillettes ou des fanatiques politiques ou religieux, rendues malades aussi, de trop de répression, d'enfermement, de contraintes sociétales, professionnelles ou familiales, elles finissent par s’épuiser, et se tarit alors la source vive qu’elles représentent, source vive car nourries du temps de l’Enfance. Mais non réservées à l’Enfance.

Les émotions aujourd'hui ont trop souvent le profil de l'enfant maltraité. La violence éducative commence ainsi par celle que nous avons intériorisée enfant, et que nous reproduisons à l’infini si nous perdons le fil du vivant qui est transformation, évolution et résilience.

L’enfant que nous étions, celui que nous portons en nous, cet enfant a des choses à nous dire.

Le premier et indispensable acte de bientraitance envers un enfant, le nôtre ou un qui nous est confié, est d’apprendre à écouter les émotions de notre petite fille, de notre petit garçon, les vivantes et les souffrantes, les joies et les tristesses, les colères, les rages, les déceptions. Mais aussi les victoires. Les injustices et les rejets. Les abandons. Mais aussi les présences aimantes et soutenantes.

Parfois, quand on les sort du placard où elles ont dormi parmi les araignées pendant si longtemps, quand on les laisse sortir de derrière les barreaux qui les retient à grand peine et n'ont jamais empêché leur cri, les émotions font peur. Elles peuvent être alors comme ces grands animaux, tous menacés aujourd'hui : ils font rêver certains d'entre nous, ils émerveillent les enfants. Mais ils réveillent chez d'autres le besoin de tuer, de mettre en cage ou de dresser.

Les émotions sont aussi comme les jeunes enfants, elles ont besoin d'être accueillies inconditionnellement, avec chaleur et compréhension, sans aucune condescendance ni hauteur, en résonance et humanité partagée avec la personne qui les ressent.

L'accueil empathique de l'enfance et la protection de la vie sauvage sont un des invariants de l’Humanité.

Parlent aujourd’hui d'émotions et d'empathie beaucoup trop d'hommes dont le regard vous met plus bas que terre, beaucoup trop de femmes qui ne supportent pas la contradiction voire même le questionnement.

Pourtant les émotions rendent la vie belle et digne d'être vécue. Et l'intelligence ne peut se concevoir me semble-t-il sans l'intégration de cette palette de couleurs qui donnent sens et corps à nos vies, palette à l'intersection entre l'esprit et le cœur, âme vivante qui nourrit notre créativité et notre capacité d’aimer.

L’émotion ne s’oppose pas à la raison, comme nous l’entendons encore très souvent aujourd’hui, elle en est la compagne. Unies, elles font obstacle à la violence. Empêchées d’être en lien, elles deviennent des maladies de civilisation, rationalité violente, technocratie glaciale et psycho- ou socio- pathie d’un côté, explosion des souffrances affectives de l’autre, mort de l’empathie, destruction du vivant.

Il y a urgence humanitaire à prendre soin de nos émotions.

Les émotions n'ont pas la vie facile

La préparation du stage de Printemps "L'enfant Intérieur, source et ressource" m'amène à regrouper toutes mes multiples notes sur les émotions. Il sera donc peut-être suivi d'autres sur le même thème, inépuisable .

Voir les commentaires

Et les Mistrals Gagnants ...

par Marie-José Sibille

publié dans Livres et films pour enfants ... intérieurs

Et les mistrals gagnants …

 

 

J’ai encore du retard dans mon métier « critique littéraire et de cinéma », un an cette fois, pour vous parler d’un film très remuant au sens étymologique du mot « émotion », ce qui met en mouvement : « Et les mistrals gagnants … ». Mais après tout, ce retard permet de remettre en lumière un superbe documentaire.

 

Et les mistrals gagnants … donc. Un film sur la vie, tout simplement, nous dit l’affiche.

Pas si simplement me semble-t-il, pour au moins trois raisons :

  • La première c’est que pour un parent, accompagner son enfant dans la maladie, la douleur, la grande dépendance, parfois jusqu’à la mort, au lieu de l’accompagner vers la vie et l’autonomie, c’est tout sauf simple.
  • La deuxième c’est que pour un enfant, savoir que la mort est possible là tout près, prendre sur lui pour ne pas encore plus « fatiguer ses parents », supporter des traitements insupportables, que les adultes essaient de faire passer comme ils peuvent, je les comprends, à coup de sourires, bisous et promesses intenables, c’est tout sauf simple.
  • La troisième c’est que je ne sais pas vous mais moi la mort me pose encore quelques questions. Cela ne veut pas dire – surtout dans certains états de lien profond seule ou accompagnée – que je ne ressens pas une continuité possible. Ça veut dire juste qu’à moins d’être dans une toute puissance insupportable ou dans la description d’une expérience intime type NDE, personne ne sait très bien ce qu’il se passe de l’autre côté. Et si mourir est évident, l’accepter est tout sauf simple.

 

La maturité « à hauteur d’enfant » des sujets principaux de ce film vous en bouche un coin, surtout quand vous repensez à la crise que vous avez piquée hier quand le c…… devant vous ne démarrait pas assez vite au feu vert, c’est là toute notre complexité.

Nous n’avons pas tous eu des enfances où nous avons dû lutter – et parfois perdre – contre la mort et la douleur permanente, mais nous avons tous senti un jour, peut-être oublié mais senti, qu’il fallait prendre sur nous parce que Maman et Papa faisaient ce qu’ils pouvaient – ou pas – mais que dans tous les cas cela ne suffisait pas.

Et nous tentions alors de nous mettre sur la pointe des pieds pour montrer qu’on assurait et que Papa, Maman et les frères et sœurs aussi pouvaient compter sur nous.

Adultes nous oublions parfois de descendre de notre escabeau plus ou moins solide pour entendre et écouter la voix du petit enfant sans immédiatement interpréter, moraliser, conseiller ou gronder.

Voire même consoler prématurément. Consoler avant d’écouter et de laisser s’exprimer les émotions.

Celles du petit enfant dont nous avons la charge.

Celles du petit enfant intérieur oublié.

Cela se comprend, c’est très difficile d’arriver à être un enfant. « Il n’y a rien qui empêche d’être heureux », nous dit un des tout petits garçons du film en mettant une plante en terre.

En arriver là, c’est vraiment tout sauf simple.

 

 

Voir les commentaires