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Bonne fête aux mauvaises mères …

par Marie-José Sibille

Bonne fête aux mauvaises mères …

 

Il y a des moments dans le cycle de l’année où les séances de psychothérapie prennent une charge particulière, liée aux fêtes, aux saisons, au rythme social. On sort alors clairement de l’individu perçu parfois comme isolé dans sa souffrance, ses blessures, pour entrer dans une vision complexe ou le tambour collectif résonne à travers chacun, à travers chacune qui ose ouvrir son coeur. 

Dans ces moments, il y a toujours Noël. Noël et le deuil de la famille idéale, Noël et les repas de famille où ne se règlent pas suffisamment les comptes, Noël et les cadeaux ratés, les cadeaux empoisonnés, les cadeaux que l’ont voudrait envoyer à la tête de ceux qui nous les ont offerts, les cadeaux vite oubliés. Et les bouleversants aussi. Parfois.

Dans ces moments, il y a la chaleur de l’été qui invite à l’amour, et murmure la solitude ou le désir qui s’est asséché comme ce ruisseau-là,  tout près, que la canicule a fait s’évaporer. 

Dans ces moments il y a les pluies de novembre qui nous rappellent et nous aident à pleurer nos morts au jour des Défunts. 

Il y a aussi le froid désespérant de février qui nous fait enfin croire en la solidarité, pour survivre, pour se réchauffer, le mois de février qui nous fait parfois mimer l’amour, pour ne pas être seul(e) le soir de la Saint Valentin.

Il y a encore la rentrée des classes et tous les rêves que nous avons laissés derrière nous, chanteur ou écrivaine, scientifique ou cosmonaute, vendeur de fleurs ou menuisière, éternels étudiants émoustillés par l’odeur des cahiers et des livres neufs, par ce soleil frais et remobilisant des matins de fin d’été. 

Dans ces instants particuliers de l’année, il y a aussi la fête des mères.

Il y a les bouquets de fleurs, de roses blanches pour ma jolie maman, de roses rouges pour ma maman d’amour, et les gâteaux dégoulinant de sucre doux comme le sein de maman, et de crème blanche comme le lait de maman …

Il y a ces âges tendres où on est presque sûres que l’école aura fait quelque chose. On peut dormir tranquilles et attendre le matin un sourire aux lèvres, le petit poème recopié en dix mille exemplaires, la boîte d’allumettes transformée en boîte à bijoux, la carte décorée d’étoiles, la fée en pâte à sel. Et le collier de nouilles.

Et puis d’un coup les ados doivent y penser tout seuls et les voilà à guetter, ces mères, tout en voulant être fortes, tout en faisant semblant d’être bien loin de ce besoin.

Elles peuvent bien cacher leur jeu. Mais les enfants savent qu’ils ont fait de la peine à Maman, ils savent bien que Maman a du chagrin.

Elles peuvent au contraire avoir du mal à cacher leurs émotions. Elles pleurent alors de ne pas se sentir aimées, car leurs ados tentent parfois de les pousser de leur chemin à grand coups de coudes et d’épaules. 

Ou simplement ils pensaient à autre chose, à eux par exemple. 

Ils ont oublié. Ils ont eu la flemme, et tentent de rattraper le coup au dernier moment. 

Ils se sont dit que Maman les aime tellement que ce n’est pas trop grave de toutes façons. 

Et la plupart du temps, chez les mères raisonnablement bonnes et banalement mauvaises, ils ont raison. 

Il y a des mères qui doutent, depuis l’âge des colliers de nouilles et même avant, d’avoir les compétences pour élever correctement leurs enfants. Elles se posent mille questions par jour - heure, minute - et pensent qu’elles ont tout foiré depuis le début, raté toutes les opportunités de rendre heureux leurs enfants. Alors leurs enfants les ont oubliées ou n’ont pas assez montré d’attention en ce jour où leur coeur est fragile, ce jour où elles se risquent parfois à paraître avoir besoin. 

C’est le juste prix à payer, pensent-elles en secret, pour avoir été une aussi mauvaise mère. 

Et puis leur enfant arrive, parfois en toute fin de journée, avec la phrase, le geste, l'attention et l'émotion qui rattrapent tout, et elles sont heureuses alors comme si jamais aucun doute ne les avait effleurées, remplies qu'elles sont de l'émotion de leur fille, de leur fils.

Il y a celles aussi qui se sentent mises à mal par l’autre mère, la nouvelle femme du père de leurs enfants, ou la mère d’origine de leurs enfants adoptés, ou même la maîtresse ou la nounou adorées. Ou l’idée qu’elles s’en font, tellement peu sûres qu’elles sont d’elles-mêmes, tellement illégitimes, même si elles vous disent toujours en relevant le menton que la seule chose dont elles ne doutent pas c’est d’avoir réussi à éduquer leurs enfants.

Cette autre femme est sûrement mieux, même si elle est haïssable d’exister. 

Même si elles lui sont tellement reconnaissantes d’exister, pour avoir donné naissance, pour prendre soin, pour contribuer à faire grandir, pour donner l’envie d’apprendre.

A elles de se sentir uniques dans les yeux de leurs enfants.

A elles de renoncer à demander reconnaissance, ne serait-ce qu'un seul jour dans l'année.

A elles de renoncer à mettre leur enfant en dette d'amour.

Il y a celles aussi qui n’ont tellement pas fait le deuil de leur propre mère que le moindre accroc sur cette journée supposée parfaite les met en larmes.

Que faire alors si ce n’est prendre le temps de cet amour inconsolable.

Et faire soi-même un bouquet de fleurs et un poème pour cette maman dont la mort nous rend toujours orpheline.

 

 

Bonne fête aux mauvaises mères …

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LE LIEN FAMILIAL AUJOURD’HUI : DES DEFIS, DES RESSOURCES

par Marie-José Sibille

LE LIEN FAMILIAL AUJOURD’HUI :
DES DEFIS, DES RESSOURCES

Cycle de trois conférences à Pau :

Vendredis 16 juin, 22 septembre, 24 novembre de 19h à 21h.


Organisé par l’Association Naitre et Grandir Ensemble

 

Article de présentation - Claire Sibille


Quelles sont aujourd’hui les visions du monde et les approches éducatives et thérapeutiques soutenantes pour que la famille remplisse ses multiples rôles, à commencer par celui de base de sécurité dans un monde en mutation ? 
Après avoir beaucoup stigmatisé les enfants ou les parents à travers toutes sortes de symptômes éprouvants, après avoir souvent désigné la mère comme grande coupable, ou le père absent, ou un enfant bouc émissaire, le discours social aujourd'hui bouge un peu et laisse plus de place à la question du lien familial, telle que l’a toujours proposée la pensée systémique, ainsi qu’à une approche positive et proactive de la relation, centrée sur les dynamiques d’attachement et de résilience.
Plusieurs éléments caractérisent cette approche, par exemple :

  1. Acceptation de la Théorie de l’attachement en France et de ses conséquences, en particulier la remise en lumière du bon lien initial, loin de la désignation permanente de la mauvaise fusion mère-enfant issue de certains psychanalystes phobiques de la dépendance. 

  2. Acceptation de la notion complémentaire de résilience, c’est-à-dire la capacité à recréer des liens positifs et à se reconstruire malgré, voire grâce, aux souffrances traversées. Nous les déclinerons ici à travers la notion de Résilience familiale et de microrésilience quotidienne.

  3. Réflexion poussée sur les violences éducatives et leur statut légal, ainsi que sur les facteurs sociaux qui favorisent ces violences, comme par exemple la notion de burn-out appliqué aux parents ou aux familles. Nous développerons une approche centrée sur la Parentalité positive et bienveillante, en prenant le soin de bien définir ces termes qui peuvent être perçus, vécus et même transmis comme des règles de bon comportement, voire des leçons de morale.

  4. Développement de l’intelligence émotionnelle et relationnelle à travers la transmission plus généralisée d’une certaine culture psy mais aussi éthologique centrée sur le lien, les émotions, la résilience et l’approche positive de la vie et des souffrances traversées. Cette approche s'inscrit dans un style de pensée plus empathique, lié aux valeurs associées à la féminité, moins axées sur les stratégies individuelles de survie et de réussite et plus sur le lien, le réseau, la solidarité, la protection de la nature et le respect profond de la différence de l'autre. 

  5. Acceptation de la modification des familles elles-mêmes, à la fois dans leur structure - monoparentale, homoparentale, mixtes, adoptantes, recomposées - mais aussi dans leur temporalité, un enfant pouvant traverser plusieurs de ces formes familiales au cours de son enfance et de son adolescence. Cette évolution actuelle du lien familial a été mis en évidence dans le dernier rapport de l’Insee (https://www.insee.fr/fr/statistiques/1281271). Ne pas accepter cette évolution, se replier sur des définitions trop rigides de la parentalité et de l'enfance, associées souvent à des postures de pouvoir et des enfermements de rôles et de genre, refuser donc ces nouvelles émergences familiales, c'est se couper d'un très grand courant créatif et transformateur qui parcourt l'humanité d'aujourd'hui. 

 

REINVENTER LA FAMILLE

(Thème développé dans la première conférence)  

  

Familles recomposées, monoparentales, classiques, adoptives, mixtes, homoparentales, … Quelles ressources pour soutenir et maintenir le lien dans les familles actuelles ? 
Adopter sa famille, c’est aujourd’hui une nécessité pour nombre d’enfants pour lesquels le lien du sang n’est plus le seul repère. Il leur faut, il nous faut, réinventer des liens familiaux chaleureux et promoteurs de croissance pour tous les membres de la famille, quelle que soit sa forme, ses origines et son histoire. 
En effet, la famille change non seulement dans sa structure mais aussi dans le temps : aujourd'hui un enfant peur démarrer sa vie dans une famille classique, avec un père et une mère, mais aussi participer d'une famille métissée de par l'origine mixte des parents, ethnique et/ou culturelle et religieuse. Il peut appartenir à une famille issue de l’adoption internationale, où les enfants aux origines ethniques variées sont parfois mêlés à des enfants "biologiques", et ou les parents sont parfois deux papas ou deux mamans, en lien ou pas avec les familles d'origine. Il peut continuer dans une famille monoparentale, de fait largement au mains de la mère, et finir dans une ou deux familles recomposées, qui seront en alliance ou en guerre ouverte selon les cas … Ou alors passer son enfance et son adolescence comme enfant unique d’une mère seule et parfois isolée … Il peut connaître de grandes tribus familiales, de grandes fratries, ou au contraire ne connaître que ses parents, voire que sa mère, et se retrouver rapidement sans famille ... 
Que de configurations possibles ! Que de liens d’attachement à sécuriser ! Que de loyautés à faire coexister ! Que d'émotions à laisser vivre, apprendre à écouter, oser exprimer !
Ainsi nous devrons apprendre à écouter les blessures d'abandon et de rejet, les questionnements autour des origines qui peuvent prendre de multiples formes, ainsi que les conflits de loyauté. Nous devrons trouver les résiliences possibles autour du lien d’attachement en fonction de l’âge de l'enfant, mais aussi du lien parental, ainsi que le poids des perceptions sociales, des préjugés, des tabous, c'est-à-dire penser la famille dans un modèle bio-psycho-social en acceptant l'existence de toutes ces influences sur ce qui nous paraît le coeur de notre intimité. Il nous faut aussi entendre le ressenti de nos enfants, même petits, ce n'est pas simple, et accepter que pour eux la vie est parfois beaucoup plus compliquée que ce que nous souhaiterions ou imaginons. Apprenons aussi les manières de parler et vivre tout cela EN FAMILLE, dans la bienveillance mutuelle, qu’il faudra encore une fois prendre le temps de bien définir ...

 

L’ADOLESCENCE : LE PIRE AGE DE LA VIE ... DE PARENT ? 

(Thème développé dans la deuxième conférence)  

L’adolescence est un âge de la vie qui peut « épouvanter » nombre d’entre nous, confrontés aux nombreux risques psychosociaux que doivent affronter les jeunes et aux mutations liées à l’émergence de l’univers virtuel dans nos vies réelles.

Mais l'adolescence c'est aussi un vent de liberté qui traverse les familles les plus tranquilles et qui demande à chaque membre de la famille, à commencer par les parents : Qu’as-tu fait de tes rêves ? Où en es-tu de tes amours ? Où s’est égaré ton désir de vivre ? Ces questionnements bouleversants peuvent faire exploser alors le couple victime non plus d’un « baby-clash » mais d’un « ado-rush » …!

Qui dit rush dit barrières de protection, et nous parlerons aussi des addictions et des transgressions, des limites et de la question de l’autorité. Qui dit rêves met en scène la question de l'identité et donc celle de l'estime de soi. Celle aussi de l'orientation professionnelle, pouvant être source de beaucoup de peurs et d'incompréhensions mutuelles.  Qui dit amours parle de sécurité dans le lien et d'appartenance, mais aussi de passion, de chagrin d'amour, et recherche d'absolu.

Nos ados doivent survivre à une double tempête hormonale et neuronale ... Nous réfléchirons ensemble pour ne pas rester sur le bord de la route à regarder passer nos coureurs, dans la crainte anticipée du vide qui suivra, mais au contraire en utilisant l’énergie traversant la famille pour la redynamiser et réinventer notre couple ou notre vie affective.

L'adolescence nous met au défi d'aimer sans le retour affectif immédiat de l'enfance, d'aimer avec moins de contrôle, d'aimer en restant derrière, d'aimer en acceptant de perdre le pouvoir ... Il est essentiel alors d'investir d'autres champs d'expérience que ceux de la parentalité, si jamais celle-ci a pris une place dévorante dans notre vie d'adulte.

 


TRAUMATISMES ET FAMILLE

(Thème développé dans la troisième conférence)  


Parfois, à travers le trauma, la présence de la mort vient bouleverser la famille. Que ce soit la mort réelle ou la menace aigue sur l’identité qui confronte à la mort, que change l’approche d’une thérapie centrée sur le traumatisme plutôt que sur la personne qui le subit ?
Inceste, maladie grave, deuil, quel accompagnement pour le traumatisme intrafamilial en fonction de sa nature ? 
Et quand l'agression vient de l’extérieur, ou est antérieure à la mise en place de la famille, comme l’est par exemple la blessure d’abandon dans la famille adoptante, comment aider la famille à être résiliente ?
Nous aborderons également dans cette conférence le thème de l’anxiété familiale, qui augmente spectaculairement dans les dernières années étant donné les menaces qui pèsent sur notre monde, terrorisme, catastrophes climatiques, problèmes d’emploi, ultra-pauvreté … et comment y réagir par un attachement familial suffisamment sécure, ni trop désengagé, abandonnant, source de troubles de la personnalité souvent nommés "borderline", ni trop enchevêtré, surprotecteur sources de troubles anxieux ou dépressifs, avec leur kyrielle de symptômes allant de la dépression à la phobie scolaire, de l'addiction au suicide.

 

 

Naitre et Grandir Ensemble (naitreetgrandirensemble@gmail.com / 06 79 71 88 47)
https://www.facebook.com/naitreetgrandirensemble/

 

LE LIEN FAMILIAL AUJOURD’HUI : DES DEFIS, DES RESSOURCES

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