Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Ce matin j'ai pleuré...

par Claire Sibille

publié dans Cette société - c'est la notre ! , Ecothérapie , Je suis psy mais je me soigne !

Ce matin, j’ai pleuré.

Pour l’état des océans, déjà plus de plastique que de poissons dans les mers, et le discours hors-sol de notre cher président au sommet qui leur était consacré ?... Non, ça c’était dimanche.

Pour la guerre en Ukraine, l’oubli tragique des autres guerres et la folie furieuse des hommes…. Non, ça c’était lundi.

Pour le jeune tabassé par un policier dans la manifestation pacifique contre la gestion de la crise sanitaire ? Non, ça c’était mardi.

Pour la jeune fille appelant au secours et traitée de grosse pute par un autre policier ? Non, ça c’était mercredi.

Aujourd’hui on est jeudi, et ce qui m’a mis les larmes aux yeux c’est une définition de mots croisés. Je lance parfois mon cerveau le matin avant d’écrire en faisant cet exercice. Et je suis tombée sur une définition récurrente : « Il fut mis en réserve », en trois lettres. Les cruciverbistes auront tout de suite trouvé la réponse : UTE. Indien d’Amérique. Vous pouvez trouver aussi : « Il vivait avec les bisons ». Et il a été massacré en même temps qu’eux … Ça c’est moi qui le rajoute car les mots croisés sont plutôt blancs et souvent machistes. Par exemple vous pouvez trouver pour SEXE : « L’un des deux est plus faible que l’autre ». Et de culture classique. Il vaut mieux avoir lu Proust et Beaudelaire plutôt que Richard Powers ou Gisèle Halimi, connaître toutes les batailles napoléoniennes plutôt que les révoltes des peuples colonisés.

Mes larmes de ce matin ont été provoquées par la sécheresse de la définition associée à une partie de l’humanité. « Il fut mis en réserve ». Cela aurait pu être : « Il fut brûlé dans des camps ». En 4 lettres. JUIF. Ou : « Elle a été gommée de l’Histoire ». En 5 lettres. FEMME. Ou encore : « Il est tué tous les trois jours en France dans sa famille ». En 6 lettres. ENFANT.

J’ai ressenti à nouveau dans mes tripes que des hommes sont capables de mettre d’autres hommes en réserve après les avoir massacrés. Comme les lions et les girafes, comme les pandas et les tigres du Bengale. C’est une réalité d’aujourd’hui, pas d’hier.

Reste la bonne question, très actuelle, de savoir pourquoi pleurer ? Pourquoi ne pas se couper définitivement de l’actualité… et des mots croisés ?

Beaucoup de symboles féminins parlent de la guérison par les larmes. Comme si les larmes étaient une ressource, une thérapie, particulièrement adaptée à la femme pour cause de biologie et de culture. Une force et non pas le signe d'une fragilité. Il existe nombre de déesses en pleurs. Par exemple, La Mater dolorosa, la vierge pleurant sur le corps de son fils Jésus, symbole de l’humanité souffrante. La déesse grecque Déméter pleurant sa fille Perséphone enlevée par Hadès, le dieu des enfers. Ou encore Freyja, déesse nordique de la fertilité, pourtant guerrière, qui voit ses larmes se transformer en ambre ou en or. En trésor.

Les larmes sont un puissant facteur de résilience, elles nous entraînent vers l’autre rive dans leur flot, elles ne noient jamais personne. Elles sont un langage universel depuis que nous sommes bébés. Elles nous portent dans le deuil. Elles nettoient la fatigue.

Que faire quand la rivière se transforme en tsunami ? La consolation est un mot que l’on a pas mal entendu ces derniers temps, suite à la parution du dernier livre de Christophe André. Se sentir accueilli dans ses larmes, sans limite de temps, sans parole inutile est une expérience thérapeutique profonde, difficile à trouver dans une société où l’expression émotionnelle forte est souvent interprétée comme pathologique et traitée avec des médicaments, une société où les larmes font peur, y compris trop souvent aux thérapeutes. Quand notre culture nomme que l’important, surtout pour les hommes, est d’apprendre à contrôler ou gérer ses émotions, ce qui passe le plus souvent par la répression, le tsunami de larmes peut évoquer les flots trop longtemps retenus. Il finit aussi par se calmer, mais parfois en ayant détruit sur son passage.

Or les larmes sont un appel au lien apaisé, aux pages qui se tournent, à la souffrance transformée. Pleinement accueillies, par l’autre, par soi-même, par le tout autre, au fur et à mesure qu’elles viennent, elles se transforment bientôt en rire, en lien partagé, en confiance en soi pour faire face aux défis du monde.

Je pourrais aussi peu m’en passer que de l’eau que je bois.

 

 

 

 

Article très approfondi sur les pleurs et leur utilité première partie. Merci à Eric Binet.

Les larmes de Freyja - Klimt

Les larmes de Freyja - Klimt

Voir les commentaires

Itinéraire d’un premier roman

par Claire Sibille

publié dans Fiction , Cette société - c'est la notre !

Itinéraire d’un premier roman

Article dédié à toute personne qui porte en elle une histoire

 

Il y a des écrivains, paraît-il, qui louent pendant 6 mois une villa au bord de la mer en Bretagne ou au Maroc et plongent dans l’écriture.

Et il y a les autres, j’en fais partie, qui arrachent chaque mot de haute lutte aux charges mentale et émotionnelle d’un quotidien certes passionnant mais très rempli.

Et encore, écrire, cela n’est rien. Mais trouver un éditeur dans ce genre de vie, depuis le fin fond de la forêt où j’habite, cela tient carrément du miracle.

Alors vous faire part de la richesse de ce parcours motivera peut-être celles et ceux qui veulent tenter l’aventure.

Et d’abord, pour ne pas se décourager, quelques règles qui m’ont aidées quand j’ai fini par les comprendre… :

  • Ne pas se comparer aux autres. Oui tel.le auteur.e qui vous tombe des mains à la deuxième page a eu le prix Nobel de Littérature. Tel autre qui vous donne l’impression de lire une composition de français de CM2 du style « racontez vos vacances et votre premier amour » se vend à un million d’exemplaires. Oui, telle star de télé réalité s’expose dans toutes les librairies et n’a eu aucun problème à trouver un éditeur pour un écrit qui s'apparente à une page de pub dans un magazine féminin. C’est comme ça ! La grande force de ces livres, c’est qu’ils ont trouvé leur lectorat. C’est la seule chose à retenir, que ces lecteurs soient des académiciens qui ne valident une phrase que si elle comporte trois imparfaits du subjonctif, une femme nostalgique du grand amour qu’elle attend toujours, ou un homme qui rêve d’être un super flic pourfendeur de méchants (ou l’inverse…), ils ont trouvé leur livre, et l’écrivain a trouvé son lectorat.
  • Participer à des concours de nouvelles. C’est l’association « Noires de Pau » en… 2005 qui m’a permis de gagner mon premier concours de nouvelles et depuis j’en ai fait régulièrement, avec de plus en plus de reconnaissance. C’est un excellent exercice et cela donne souvent l’occasion de se voir édité dans un ouvrage collectif. Le dernier en date : « Loin du cœur », au profit de l’association Solidarité femmes, chez BetaPublisher.
  • Faire appel aux professionnels. Même si mon roman était fini avant toutes les démarches que je vais vous détailler après, c’est le fait d’avoir fait appel à des professionnels du livre qui m’a permis de franchir le pas de l’édition. Avant j’avais publié en auto-édition avec un certain succès, et je suis loin de renier ce procédé que je réutiliserai certainement à un moment. J’ai également trouvé un éditeur toute seule pour mon essai : « Le Jeûne, une thérapie des émotions » en contactant les éditions Exuvie et Fabien Moine sur un coup de tête après une de ses vidéos et j’en suis très satisfaite.

Mais pour la fiction, et en particulier mon premier roman, je pense que je n’y serai pas arrivée sans cette étape qui peut paraître onéreuse, mais qui reste souvent très raisonnable, surtout si vous faites le pendant avec les heures inutiles et les frais de poste pour des envois inefficaces aux maisons d’édition saturées.

Et ne soyez pas susceptibles ! Si vous payez quelqu’un, c’est bien pour qu’il vous aide à vous corriger. Non ? C’est pour qu’il vous fasse des câlins ? Dans ce cas ça ne porte pas le même nom…

Voici donc les étapes essentielles qui m’ont conduites jusqu’à l’édition d' « Inventaires ».

Conception et Gestation

Ce livre est né, comme d’autres de mes écrits, après la mort de ma mère, vers 2015. Les inventaires au début de chaque chapitre sont venus en vidant son appartement. J’ai noté les objets que je trouvais au fur et à mesure dans un carnet avec l'intention d’en faire quelque chose. Mes parents ont accumulé nombre d’objets exotiques et improbables, comme par exemple une boîte entière de vieilles paires de lunettes récupérées sur les ancêtres au moment de leur mort. Comme d'habitude l'écriture a pris le pouvoir, et la créativité des inventaires a vite dépassée celle de mes petits carnets. Dans la première phase de brouillon, j’ai eu l’élan de l’envoyer à 4 ou 5 éditeurs. Je me rappelle, mais c’est très loin, avoir reçu une lettre très encourageante des Éditions du Seuil et aussi un petit mot d’Albin Michel, manuscrit, qui disait qu’ils ne pouvaient pas le prendre avec regret. Tout ça pour dire que les éditeurs ne sont pas tous méchants et insensibles. Et puis j’ai oublié ce roman dans mon ordinateur et dans quelques carnets au fond d’un tiroir, je me suis consacrée à mes autres écrits.

Risque de fausse couche

Le manuscrit n’est ressorti qu’au Printemps 2019 et j’ai d’abord été effondrée par la relecture ! Ce n’était pas un brouillon, mais le brouillon d’un brouillon… Tentée de tout mettre à la poubelle, je me suis mise à la tâche, car l’écriture devenait de plus en plus vitale dans ma vie et j’avais quand même le début d’une histoire.

Accouchement à la maison

Une fois la première version du roman terminée, fin 2019, je l’ai proposée à mon cercle de premiers lecteurs pendant le printemps et l’été 2020. Ce premier cercle m’a permis à la fois de prendre confiance dans le livre tout en faisant des corrections essentielles.

Pendant ce temps, je m’étais inscrite à une master class avec « The Artist Academy ». La formule très souple me permettait d’écrire dans un emploi du temps surchargé, et de produire des textes à réutiliser dans d’autres romans. Mais surtout d’échanger avec d’autres férus d’écriture, ce qui est vraiment super. J’ai eu de très bons retours sur mes textes qui ont continué à nourrir ma confiance.

Pendant le confinement du Printemps 2020 j’ai franchi un nouveau cap en participant aux ateliers du magazine littéraire « Lire » qui demandent un peu plus d’engagement tout en restant très accessibles. J’y ai appris beaucoup de choses sur l’écriture mais aussi sur la manière de se faire éditer que j’ai utilisées pour mes romans suivants, « Inventaires » étant déjà terminé.

Bébé entre en crèche

À l’automne 2020 j’ai été mise en contact avec une agente littéraire, Georgia Terzacou, à laquelle j’ai commandé une fiche de lecture très encourageante, et porteuse de conseils essentiels pour améliorer le manuscrit. Elle a pris en charge le roman et l’a proposé à 9 maisons d’édition entre début 2021 et le Printemps.

J’insiste encore sur le contact avec les professionnels de l’écriture : Agente littéraire et fiche de lecture, Ateliers de bonne qualité et finalement coach (Frédérique Anne) à partir de mon deuxième roman m’ont permis de franchir des caps incontournables. Si votre but est vraiment de vous faire éditer et que vous avez un peu de moyens financiers à y consacrer, n’hésitez pas.

Mais comme pour un psy, choisissez les personnes avec qui ça colle !

Sur les neuf éditeurs contactés par Georgia, deux n’ont pas répondu, pour deux autres ce n’était pas le bon moment, ils croulaient sous les manuscrits « post-confinement ». Pour les cinq autres, le texte ne convenait pas, en particulier car il ne s’inscrit pas dans un « genre » plus facilement commercialisable aujourd’hui (romance, SF, polar…).

L’école maternelle

Comme on approchait de l’été 2021, je suis tombée sur l’annonce du concours du livre non édité, organisé par les Editions Novice, sur la page FB d’« Edith et Nous », une plateforme en ligne qui propose une manière radicalement nouvelle de contacter les maisons d’édition. Un vrai bonheur pour les auteurs qui n’ont plus la corvée de devoir choisir les maisons et envoyer leur manuscrit. J’ai gagné ce concours et j’avoue avoir mis quelques heures à croire au courriel que j’ai reçu.

L’âge de raison

Le travail éditorial fait souvent peur aux auteurs, ils craignent d’être trahis ou obligés de trop modifier leur texte. Pour moi il a été un vrai régal, l’impression de ciseler chaque chapitre et chaque mot, de prendre du recul par rapport au livre tout en me l’appropriant en profondeur et en le validant. Cela a été aussi un travail d’affirmation car si la plupart des corrections étaient pertinentes d’autres non, voire contraires à ce que je voulais écrire, et il a fallu que je puisse le faire passer. Le compromis final a été dans le sens d’améliorer mes propres propositions et je me suis sentie vraiment respectée. J’ai eu un choc positif en voyant la couverture, qui correspond tout à fait au livre, alors que j’appréhendais cette étape !

Petit roman deviendra grand… Et fera des petits à son tour…

Je suis maintenant dans le monde d’après… Celui où il faut faire connaître mon roman, celui où j’ai la surprise de lire des articles, voir des infos, recevoir des posts sur les réseaux… Le temps de la communication et des échanges que j’espère nombreux. Car un livre c’est aussi un support de communication avec des lectrices et des lecteurs. Là encore, il est important de s'impliquer, de faire connaître ses écrits, de s'engager dans la promotion. Rien ne se fera sans vous. Et la suite ? La route est ouverte. Le deuxième roman, « Mauvais Genres » est terminé, et je l’ai confié à Edith et Nous. Le troisième démarre.

Bienvenue dans mon univers romanesque, et surtout, si vous portez une histoire, ne lâchez rien !

Pour les Parisiens, une super rencontre en perspective, le 23 mars !

Pour les Parisiens, une super rencontre en perspective, le 23 mars !

Liens utiles, dans l'ordre chronologique :

- The Artist Academy : https://www.the-artist-academy.fr/fr/

- Georgia Terzacou : https://www.monagentlitteraire.fr/

- Ateliers "Lire" : https://www.lire.fr/collections/ateliers-ecritures

- Frédérique Anne : http://frederiqueanne.fr/

- Edith et Nous : https://www.edithetnous.com/

Itinéraire d’un premier roman

Voir les commentaires