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cette societe - c'est la notre !

Toutes les mères sont des saintes … sauf celles qui tuent leurs enfants.

par Marie-José SIBILLE

publié dans Cette société - c'est la notre !

Mardi 8 décembre, Immaculée Conception

 

« Chaque mère est une Marie, chaque mère est cette femme formidable qui nous donne la vie et qui nous guide … » nous dit Patrick de Carolis[1] avec beaucoup d’émotion sur France Inter, juste avant le journal, où j’entends une fois de plus la tragique  histoire de Typhaine, petite fille abandonnée à la haine d’une mère déchaînée et de son compagnon.



Si je prends quelques instants pour essayer de ressentir quel a pu être le calvaire quotidien de cette petite fille, avant le dernier acte, celui de la douche froide où elle a suffoqué, si je convoque en moi, et cela est aisé, la terreur, le froid, l’absence de tout refuge, je fonds en larmes et je quitte mon écran pour pleurer sur la souffrance du monde.

Et par là même je participe à une des fonctions maternelles les plus subtiles, les pleurs de compassion de la Mater Dolorosa, la Vierge des douleurs, celle qui apparut par exemple à deux petits bergers de La Salette en 1846. Le visage inondé de larmes, elle leur dit: « Depuis le temps que je souffre pour vous autres ! ». J’imagine que ses larmes ont depuis continué à couler.

Je vais donc te quitter Typhaine, pour pouvoir rester quelques minutes à écrire, à partager, à essayer de comprendre non pas ce qui peut se passer dans la tête et le coeur de ces parents, ce n’est pas l’objet ici, mais qu’est-ce qui peut disfonctionner à ce point dans une société pour qu’elle puisse produire ce type d’acte, et continuer de courir en avant comme si de rien n’était.

 

Il y a des jours, il y a des actes, où le monde entier devrait s’arrêter pour réfléchir.

Ou simplement s’arrêter pour sentir que cela existe.

 

Et, quelles que soient nos croyances, ce que cela implique en terme de sens, bien loin des explications sociopsychologiques indispensables, si confortables, mais si fragiles face au néant.

 

Pourrions-nous au moins utiliser ces trop nombreuses situations pour arriver enfin à séparer la mère de sang de la fonction maternelle? Nous en sommes loin. Que ce soit dans le domaine de la protection de l’enfance en France, de la psychothérapie, et tout simplement de la vie familiale quotidienne, nous continuons à les confondre, en demandant à la première d’incarner la seconde, ce qu’elle fait parfois, ce qu’elle se torture pour faire souvent, dans tous les cas, peut-être les plus nombreux, où elle assume cette injonction.

 

Peut-être, moins adorées, les mères seraient-elles moins souvent indignes ?

 

La fonction maternelle est tellement indispensable à la vie, qu’il est aisé de la surinvestir.

La fonction maternelle, c‘est avant tout le premier et le dernier refuge, la possibilité d’exister en sécurité dans un monde qui ne peut être, au départ, perçu que comme hostile. C’est en cela que la maltraitance maternelle est sûrement la pire de toutes. Quand elle existe, plus d’abri possible, que le désespoir, et peut-être le soulagement que cela enfin se termine, la mort devenant alors à son tour le refuge.

Le monde ne peut acquérir chaleur, couleur, sécurité, plénitude, vitalité que dans la relation fondatrice avec cet être doux et chaud, joueur et nourricier, attentif et absent, parfois rieur, parfois triste, bavard et créatif que l’on appelle « Maman ». Le plus important n’est pas tant que la mère de sang incarne la Maman. Mais bien, et nous en sommes très loin, que chaque enfant de la terre puisse vivre cette expérience d’avoir une « maman », qu’elle soit sa mère biologique, sa mère d’adoption, son papa,  un homme, une nounou, pourquoi pas une louve, finalement peu importe !

 



[1] Nonobstant, France Inter, 1/12/09

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Pour vivre nos rêves, désobéissons !

par Marie-José SIBILLE

publié dans Cette société - c'est la notre !

Mais d’abord, à quoi peut bien servir l’obéissance ?

Elle est avant tout un excellent liant, d’abord familial, puis social. Si l’obéissance ne faisait pas partie de nous, au même titre que certaines qualités humaines comme l’empathie, la société des hommes n’existerait tout simplement pas.

Elle est aussi une attitude de survie qui a fait ses preuves, que ce soit l’obéissance aux pompiers en cas d’incendie, aux parents quand il s’agit de traverser la route, ou à la loi quand il s’agit de ne pas boire en conduisant.

Mais.
Pour exister, l’obéissance a besoin de bases qui sont, elles, potentiellement dangereuses :

-          l’adulation d’un chef ou d’un maître à penser qui empêche toute autre forme d’empathie que celle qui me relie à cet objet d’amour ;

-          la peur de ne pas appartenir, de se retrouver seul, exclus, abandonné, montré du doigt ;

-          le respect aveugle d’une hiérarchie qui empêche toute forme de pensée créatrice sous prétexte d’appartenance ;

-          la mise en avant exclusive de mes intérêts et de ma survie, comme dans une bande de malfaiteurs, ou dans tous les systèmes de pouvoir, nombreux, où l’obéissance aveugle est la clé indispensable qui permet de gravir les échelons ou d’obtenir une place supposée définitive ;

-          le besoin d’unanimité à n’importe quel prix, la jouissance de se sentir une goutte d’eau dans un océan qui nous berce et nous contient, comme dans un concert de musique ou dans un supermarché ;

-          enfin, mais elle n’est finalement pas la pire, l’obéissance sous contrainte extérieure qui suppose un abus de pouvoir et une forme ou une autre de violence sur la personne qui obéit.

On est alors loin, entre adultes, du respect de l’enfant pour la supposée bienveillante autorité parentale, celle qui lui permettra de grandir en sécurité, et d’arriver un jour à la transgression choisie qui est l’objet de cet article. Nous sommes plutôt dans un collectif qui fait écho aux systèmes familiaux maltraitants, ceux qui confondent la loi et la terreur, l’amour et l’identification à l’agresseur, l’intelligence et l’unanimité de pensée.

Nous parlons d’obéissance aveugle, car l’obéissance nous fait mettre non seulement nos pas dans les pas d’un autre, mais la pensée d’un autre dans notre pensée. Nous ne voyons donc plus, n’entendons rien d’autre que la voix adulée. Celle-ci peut aussi être écrite, ou encore, comme c’est le cas dans nos démocraties actuelles, véhiculée à grand renforts de films et autres médias fournisseurs d’émotions fortes à bas prix. Elles nous entraînent insidieusement, sauf exception, vers une douce léthargie, vers un confort unanimiste, un peu comme les Lotophages que rencontra Ulysse avant d’arriver à bon port, un peu comme les passagers d’un avion bercés par la voix de l’hôtesse juste avant le crash.

A quoi allez-vous obéir aujourd’hui ? Car vous obéirez bien sûr.

La désobéissance serait-elle alors, simplement, la capacité de choisir ?

Car elle ne peut être la simple révolte. Si nous repartons dans le microcosme familial, le « non » à l’ordre parental est d’abord et avant tout un autre réflexe de survie, complémentaire à celui de l’obéissance, qui nous entraîne à développer notre autonomie « au cas où » le groupe ne serait plus là pour répondre à tous nos besoins. Il est ensuite, à l’adolescence, l’expression d’une insécurité fondamentale sur mon identité. Serais-je pharmacien parce que Papa ne l’était pas et qu’il ne veut surtout pas que je le devienne ? Vous comprendrez sans peine que ce n’est qu’une variante de : je serai pharmacien parce que Papa ne l’était pas et a toujours rêvé de l’être. L’insécurité peut devenir ainsi un état d’être quasi permanent, tant il peut être long de se différencier des désirs et des frustrations de nos parents, mais aussi de l’ensemble de notre entourage familial, voire social proche.

Mieux vaut obéir, c’est moins fatiguant.

Imaginons que malgré tout, poussés par un insidieux désir de penser par vous-mêmes vous décidiez de faire ce long travail de différenciation.

Vous allez trouver un réseau complexe de tellement d’influences croisées sur vos choix de vie, qu’il y a risque de se perdre, de finir paralysé. Ou de renoncer.

Et donc, qu’il faille désobéir pour vivre nos rêves, certes, quand la pression est évidente, et le désir aussi.

Mais peut-être finalement, que le plus important c’est de pouvoir rêver, rêver d’un rêve singulier, le mien, et qu’obéir ou désobéir n’est alors plus le problème, tant l’urgence et l’importance de concrétiser ce rêve va alors m’habiter. Réaliser ce rêve singulier, m’amènera naturellement à devoir me différencier, m’affirmer, transgresser des limites, renoncer à des sécurités, ainsi qu’à des loyautés familiales ou sociales trop présentes. C’est le prix à payer, semble-t-il, pour pouvoir se regarder dans la glace tous les matins, sans s’arrêter aux rides, et regarder ses enfants dans les yeux, sans éviter leur exigence.

Les défis sont nombreux, aujourd’hui comme hier, où cette réflexion sans réponse absolue paraît indispensable. Certains parlent, ou montrent tellement bien leur chemin, qu’il est tentant de les suivre, de copier leur pensée, de vivre à travers leurs émotions. Il est parfois plus facile de croire que cela nous rapproche de notre rêve singulier. De croire en l’autre, plutôt que de croire en soi. Et peut-être est-ce effectivement le bon choix. Prenons simplement le temps de nous poser la question.

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