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C'est avec les vieux sages qu'on réfléchit le mieux ...

par Marie-José SIBILLE

publié dans Cette société - c'est la notre !

Ah, ces vieux sages!

Ce matin, alors que je buvais mon café en récapitulant sur un bout de papier, avec beaucoup d'auto-compassion, la liste des tâches urgentes qui m'attendaient dans la journée, la voix chevrotante d'Albert Jacquard, semblant déjà venir de l'au-delà, est venue bouleverser mon ordre de priorités.
En fait cette voix venait de France Inter, émission philosophique du samedi matin que j'aime bien, Parenthèse:
http://sites.radiofrance.fr/franceinter/chro/parenthese/index.php

Avec une stratégie pédagogique qui a fait ses preuves bien avant lui, il nous offrait en 10 minutes le mal et le remède au mal.
Le chiffre qui tue: les 500 familles les plus riches du monde gagnent plus d'argent que le milliard de personnes les plus pauvres. Difficile d'apprécier pleinement sa tartine après ça.
La pensée qui sauve: Moins se gaver, justement, et arrêter d'éduquer nos enfants à la compétitivité, à être le premier, pour leur enseigner que l'homme ne se définit qu'en relation avec ses congénères, contrairement aux animaux dit-il; ça c'est moins sûr.
Quelques uns de ses mots de mémoire: "Oser dire à un enfant qu'il est un gagnant, c'est criminel ... Vouloir être le premier, c'est déjà se dissocier, or l'être humain se construit avec les autres ...  il a besoin des autres pour être lui-même ... Le but n'est pas d'être le premier mais de vivre sa vie ... Les enfants comprennent que la vie est une aventure, autre que celle de la compétition et la consommation ... Oser monter une société sur la compétition, c'est accepter la catastrophe ...  ".
Il paraît que des écoles marchent très bien sans compétition, au Canada et dans le nord de l'Europe, comme d'habitude. Je suis bien placée pour soutenir cette position. Mes jeunes enfants ont fini l'année scolaire épuisés après des évaluations de fin d'année de plusieurs pages (y compris en maternelle!) et viennent juste d'arrêter de tomber malades à tour de rôle pour décompresser, nous sommes déjà le 24 juillet quand même. A noter que, chacun de mes enfants étant différemment adapté à la machine scolaire, la première de la classe suradaptée a tout autant souffert que le passager clandestin rêveur et joueur qui fait l'objet des inquiétudes de l'institution. Pourquoi? Parce qu'il est demandé à la première d'être encore plus première, en faisant le travail de la classe au-dessus, et parce que le dernier commence à se demander pourquoi tout le monde s'inquiète alors qu'il s'amusait si bien. Mais la petite dernière aussi, qui n'est ni première, ni à la traîne, a souffert de la pression continue du peloton pour rester dans les rangs. Bref, je suis décidée à mobiliser toute mon énergie pour que l'année scolaire prochaine soit plus en accord avec les valeurs d'Albert Jacquard, au moins pour mes enfants. Et j'ai la chance de vivre près d'une école formidable à tous les niveaux, école préservée de campagne, ou art, sport et convivialité ont encore leur mot à dire, et où les enseignants font partie de ceux, nombreux, qui ne cèdent pas trop facilement à la folie raisonnable de l'institution.

Là où cette position d'Albert Jacquart rejoint la psychothérapie, c'est que notre travail amène souvent les personnes à arrêter de vouloir correspondre à une norme de soi-disant excellence, du style "passe d'abord ton bac mon fils", pour aller vers la réalisation de soi, vaste sujet sur lequel je reviendrai par ailleurs. Là c'est juste pour vous dire: sauf dans les dérives à l'américaine, et à la française, où une certaine psychothérapie est utilisée comme outil de manipulation pour faire à tous prix partie des "winners",  à grand coup de courses sur les braises, de sauts à l'élastique, ou de pensée positive, le travail de l'intime nous amène à lâcher le besoin d'être le premier, pour aller vers le désir d'être soi.

La semaine dernière, France Inter se faisait l'écho absolument non distancié de l'élogieuse discipline populaire, qui, "malgré la crise", faisait que la consommation des ménages avait augmenté de manière significative. J'ai été heureuse, ce matin, de voir qu'il y avait encore quelques voix de haute-contre qui pouvaient se faire entendre dans cette auto-congratulation franchement écoeurante, relire le chiffre qui tue ci-dessus.

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Le psychiatre et l'amour ...

par Marie-José SIBILLE

publié dans Le métier de Psychothérapeute

"Rapports sous ascendant psy. 12 ans de prison pour le psychiatre accusé de viols
Par Stéphanie Lacaze, libebordeaux.fr du 04/07/2009 et Nouvelobs.com du 05/07/2009"

Cette information aurait du mal à passer inaperçue en plein milieu du débat sur les psys.

J'hésitais pourtant à l'utiliser pour mon blog.

Est-ce que j'ai vraiment besoin de comptabiliser les horreurs et transgressions commises par les psychiatres pour gagner en légitimité?
Mais ma partie la plus mesquine et vindicative ne voulait pas lâcher.
C'est mon mari qui a résolu le problème: "le pauvre, on voit bien qu'il n'a pas fait de psychothérapie", m'a-t-il dit en riant.
Tout était dit: ce n'est pas tant la perversion individuelle de certains qui me gène, elle sera toujours là, et très certainement plus du côté des psychiatres que des psychothérapeutes appartenant à une organisation référente.

Ce qui m'est insupportable, c'est la perversion de la loi.
En excluant le travail sur soi, et tout ce qui est la base de notre profession, et en accordant d'office le titre de psychothérapeute à ceux-là mêmes qui n'ont aucunement ces exigences, Roselyne Bachelot - ou plutôt l'égrégore qui s'exprime à travers sa bouche - met en place une loi perverse.
Elle n'est ni la première, ni la dernière, mais c'est dans ces cas-là que je ressens vraiment le besoin de me battre. Evidemment, comme je suis psychothérapeute, j'ai conscience que ça me parle aussi de mon histoire et de moi, et je ne mettrai donc pas une bombe dans la voiture de Madame la ministre. Mais je peux dire à quel point ces comportements sont intolérables et anti-démocratiques, dans le sens où la démocratie est par définition le lieu de pouvoir du peuple, dans toute sa complexité et ses différences, et que ce peuple-là vient justement nous voir. .
Croire qu'un diplôme universitaire, et j'aime les études universitaires, peut remplacer la traversée de ses ombres, l'intégration de son histoire, l'expression de ses émotions refoulées, c'est un drame.
Confondre l'acquisition de diplômes et la maturité intérieure, c'est une confusion qui existe chez nous à partir du cours préparatoire.
Beaucoup de bourreaux de l'histoire avaient une liste impressionnante de diplômes, et peu à mon avis, un psychothérapeute référent ...  

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