SAVOIR, CELA N’EST RIEN, SAVOIR, LA BELLE AFFAIRE …
Mais Apprendre !
Apprendre c’est ouvrir une nouvelle fenêtre sur le monde, comme un nouveau regard, c’est rajouter une nuance dans le kaléidoscope des émotions, c’est découvrir une nouvelle manière d’être en vie.
Savoir est sédentaire, pesant, aussi lourd à déplacer qu’une énorme bibliothèque pleine de livres dont la moitié n’est pas lue.
Savoir impressionne, fronce les sourcils, décide qui a tort ou raison, qui est dans le vrai, qui est condamné au faux.
Apprentissage est nomade, léger comme la plume d’oie qui court sur la page blanche ; il parcourt le monde sur ses deux grandes jambes et sort ses ailes pour traverser les océans ou passer par-dessus les montagnes.
Savoir attend au fond de son château poussiéreux que le fils prodigue revienne, de nouveaux livres plein le sac à dos. Savoir compte ses livres comme l’avare compte ses sous, avec le plaisir anxieux de celui qui, dans le trop, a encore peur de manquer.
Apprentissage dévore les livres à pleines dents, en prend le meilleur et les oublie sur un banc public, là où un autre viendra les lire. Apprentissage trouve que les meilleurs livres sont écrits sur la poussière des chemins de traverse, dans les rides des vieillards et les rires des enfants.
Savoir s’est arrêté de penser.
A quoi bon penser quand on sait ?
Savoir s’est arrêté de bouger.
Bouger voudrait dire rencontrer l’inconnu, et prendre le risque de ne plus savoir, de devoir apprendre.
Apprentissage, lui, a peur de se poser et de dire, voilà, maintenant ce que je peux apporter ; il a du mal à poser sa pierre, de peur qu’elle ne lui coupe les ailes.
Qui va réconcilier ce père anxieux et ce fils prodigue ?
La muse, bien sûr.
Celle qui fait pousser des ailes aux pieds de plomb, et donne la force d’aller vers l’inconnu ; mais celle aussi qui a besoin d’avoir les pieds sur terre, et de voir naître l’œuvre qu’elle a inspirée.
En ce mois de septembre où retentissent à nouveau les cris des enfants, mais aussi ceux des adultes, dans les cours de récréation, en ce mois où les grandes personnes se posent mille questions pour savoir comment faire des élèves de « bons » élèves, demandons-nous surtout comment ne pas leur couper les ailes, et comment les aider à poser leur pierre.
Apprendre est un besoin pour l’enfant, une nécessité de survie.
Apprendre est un plaisir, apprendre est un désir, quand le gavage est remplacé par le jeu et la dégustation.
Comment avons-nous fait nous, adultes, pour rendre l’apprentissage aussi pesant que le savoir ?
C’est quand, au fait, la dernière fois que vous avez ouvert une nouvelle fenêtre sur le monde ?