GO, Etre parent d'ado !
GO être parent d’ado !
Être Parent d'ado ? Grave frais, Trop stylé les gens, Pire que bien …
GO être Parent d’ado !
Tous les parents de collégiens en phase terminale - le collège, en phase terminale - auront reconnu le langage élaboré et dynamisant ci-dessus.
L’adolescence est présentée comme l’épreuve ultime du parent. C’est un vaste continent qui va de 13 à 19 ans, c’est-à-dire six vies différentes. Au moins. Pour eux comme pour nous.
Aujourd’hui parlons de la fin des années collège.
Et commençons par le pire.
A la fatigue des parents du 21ème siècle soumis à toutes les contraintes que vous connaissez, s’ajoute les stress caractéristiques de ceux qui ne peuvent plus garder leurs agnelles au champ et leurs taurillons au pré … Les menaces que font peser le monde sur nos courageux teenagers débutants ont de quoi rendre dingue.
Il y a l’effet réellement abrutissant des écrans, les yeux explosés et le cerveau en jachère comme après une nuit en boîte sous consommations illicites …
Il y a le prof de sport qui est encore absent cette semaine au collège, une des aberrations de l’éducation nationale française. Quatre heures théoriques, c’est déjà la misère pour des jeunes qui devraient y passer la moitié de leur vie. Le corps, c’est le support de tous les passages, de toutes les initiations. On parle beaucoup de la tête, des idées, de l’intelligence, de la maturité … Mais quand on grandit, et plus tard quand on vieillit, ce qui change visiblement c’est le corps. Or en France, il n’y a que la tête qui compte, ou plutôt le quart de la tête fort en maths.
Il y a toutes les pressions des années collèges, les normes incontournables.
Par exemple :
- Coca, Mojito (sans alcool mais ça viendra), Adidas : On ne peut pas se battre sur tous les fronts. Le renoncement au Coca et au Mac Do, c’est déjà héroïque, alors vous n’allez pas l’empêcher d’acheter la paire de chaussures qu’il faut porter, en plus avec ses sous … Si ? C’est dingue ces histoires de godasses.
- T’es moche ! Le look ? Omnipotent. Surtout pour les filles. Les BG (beaux gars, belles gosses) s’aiment entre eux et se selfiesent à longueur journée. Les décrétées « pas belles », les « moches », se retrouvent souvent chez l’infirmière pendant la récré … La liberté, ça s’apprend dans la durée. Maman tu es gênante, me disent-ils avec de plus en plus d’humour quand je ne réponds pas à leurs critères minimum de comestibilité sociale. Ils prennent du recul à vue d’oeil … et rechutent régulièrement. Sensibles à la mort sociale de l’exclus, capables de dire cette exclusion, ils ont peur de la vivre là où la plupart d’entre nous l’ont subie à leurs âges, sans trouver les mots qui n’existaient pas encore. Leur révolte s’exprime souvent dans une zone bien délimitée qui est le début de leur liberté d’être. Leurs cheveux, leur style, leur musique, leurs convictions aussi.
- Choper de la meuf, ça le fait : Entre les ultra-machistes de 14 ans qui veulent « choper de la meuf », insultent leur mère souvent solo, s’imposent à leurs copines et cassent - volontairement - leur portable au moins une fois par mois pour qu’elle leur en rachète un, et les garçons sensibles que les filles trouvent efféminés et qu’elles aiment bien avoir comme copain, même s’ils ne sont pas gays, bonjour le défi pour les garçons. Les pressions de genre sont dures à cet âge surtout que le prof de SVT a parlé des ovaires et des testicules, des oestrogènes et de la progestérone, et des hormones qui se baladent, mais le clitoris, l’amour et le plaisir partagé, c’est pour l’an 3000. De même que parler de la pression pornographique d’Internet où le pire s’exhibe sur des réseaux qui n’ont encore aucune loi réellement protectrice.
- Maman, je suis une clocharde ! La scolarité a comme une de ses priorités affichées de gagner du fric : comment tu vas finir SDF si tu continues comme ça ! Etre riche, une des vocations les plus répandues aujourd’hui. Avant, les élites, celles qui n’avaient jamais connu l’ombre d’une insécurité matérielle, faisaient croire que ce n’était pas leur but, le fric. Juste l’élévation culturelle. Et elles sortaient de l’ENA pour sacrifier leur vie au pays. Mais c’était il y longtemps, quand la France était une aristocratie. Depuis on a coupé la tête au roi, et les choses ont changé.
Qui dit pressions dit dépression, et les dépressions d’ados sont fréquentes. Elles se camouflent bien, mais n’oubliez pas de demander combien de fois par semaine chez l’infirmière, pour les filles surtout, et combien d’heures par jour à tuer des mort-vivants hyperactifs, surtout pour les garçons, mais l’inverse est vrai aussi.
Ils sont vraiment courageux nos ados. Surtout les bêtes, moches et pas méchants. Ou considérés comme tels.
Et être parent d'ado c'est formidable.
Quand ça se passe suffisamment bien, il y a les découvertes musicales, les séries et les livres partagés, comme vecteurs d’émotions différentes et complexes, le sport et les jeux pour liquider les tensions dans les éclats de rire, les discussions politiques, sur les sujets d’actualité ou de société, ou ils s’entraînent à affuter leur pensée et leur parole.
Il y a les projets d’avenir qui prennent rêve et début de corps, même s’ils ont le temps de changer dix fois, et heureusement. Pompier et maîtresse se sont diversifiés. Ils veulent être cuisinier, avocat, pilote d’hélico, écrivain. Et le lendemain acteur, chanteuse, astronaute, vétérinaire, … Mais aussi banquier ou femme d’affaires ! Et ils nous font réfléchir sur le boulot pour lequel on se lève tous les matins.
Certes l'ado à des humeurs, mais l'enfant a des crises, et l'adulte des coups de stress, de gueule, de blues ou de grisou, donc pas grand chose à signaler de ce côté-là.
La violence émotionnelle, chez tous, est une réalité à laquelle la famille doit se confronter pour y répondre le mieux possible. C’est même je pense une de ses fonctions fondamentales.
L'altérité, un autre défi du parent d'ado. L'ado, s’il ne va pas trop mal, va tester sa créativité et sa pensée propres. Mais aussi la solidité des limites protectrices, et la solidité tout court de ses parents, et de leur couple.
Le partage solidaire des tâches est un bon support de négociation et de maturation. Dans les travaux d’utilité familiale collective : tenir bon pour le ménage hebdomadaire, la gestion du linge sale, en famille mais chacun pour soi, et la chambre, sanctuaire oui, poubelle non.
Le oui mais à chaque nouvelle étape de l’autonomie, et tous les oui mais aux nouveaux territoires virtuels, potentiellement encore plus dangereux que les sorties en ville, et on se rassure comme on peut, You Tube c’est surtout pour les abdos et les comiques, Snap pour les copains et les copines, mais on ne pourra pas empêcher toutes les horreurs d’arriver jusqu’à eux alors autant les nourrir au maximum de positif, qui les rendra de plus en plus allergiques à la violence et à la laideur …
Si vous désespérez trop par moments, je vous invite à imiter les anciens Egyptiens. Sachant qu’après la mort, leur âme devait être plus légère que la plume de la déesse MAAT, pour l’alléger, ils pratiquaient chaque soir la confession négative : aujourd’hui je n’ai pas volé, je n’ai pas tué, je n’ai pas insulté, je n’ai pas menti, je n’ai pas été de mauvaise humeur …
Aujourd’hui votre ado ne s’est pas drogué, ne s’est pas soulé, n’est pas tombé dans les mains d’un pédophile, n’a pas eu d’accident de deux roues, n’a pas volé, n’a pas acheté son premier paquet de cigarettes, n’a pas insulté son prof …
Et quand la tension monte, détourner le regard et s’occuper de soi. Cela met du tiers, de l’espace, de la respiration, l’ado en a besoin, et le parent devrait en avoir le désir.
Car parents, comment quitter le nid ? Comme l’enfance fait remonter chez les parents toutes les ardoises non réglées du passé, l’adolescence fait remonter toutes les libertés que nous avons gâchées, les désirs non réalisés et les amours ratées.
Mais aussi l’envie de nouvelles libertés, de musique et de danse, de nouveaux désirs de réalisation personnelle dans de nouveaux désirs, amours et aventures.
Il y a beaucoup de divorces au moment de l’adolescence, mais il y a aussi des couples qui en profitent pour retomber amoureux …
Il y a des chômages imposés et des burn-outs. Mais aussi des hommes et des femmes qui décident de larguer leur boulot pour devenir écrivain ou guide de haute montagne, enfin.
Alors, GO, être parent d’ado !
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https://www.causette.fr/le-mag/lire-article/article-1581/impuissance-coupable.html
Article très dur mais éclairant dans Causette de septembre 2016.