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Comment vas-tu? Comme un lundi ...

par Marie-José SIBILLE

publié dans Le quotidien - c'est pas banal ...

Les jours de la semaine animent notre vie sociale et intérieure comme le font les saisons, les rythmes des planètes, la météo, les marées et les cycles de la lune ; les hommes robots enfermés dans la tour de verre et d’acier de la raison nient cette influence, cette interdépendance, mais ils n'ont fait que remplacer la lune et les marées par la bourse et les fluctuations du marché, à chacun ses divinités.

Les Dieux du calendrier sont pourtant là, présents, aidant les hommes et les femmes à danser leur semaine, à devenir maîtres de leur temps de vie.

Depuis « Un lundi au soleil », un rêve impossible puisque lundi est le jour de la lune, jusqu’à « Je hais les dimanches » tant ce jour du soleil, et donc de la famille patriarcale peut mettre en évidence l’isolement affectif, les chanteurs populaires ne s’y trompent pas. Ils nous parlent de ce qui nous parle, ils nous chantent des airs connus.

Les hommes politiques aussi d’ailleurs, qui s’essaient depuis les plus anciens des pharaons  à modifier le calendrier autant qu’à conquérir ou réorganiser le territoire. Et les entreprises qui depuis Coca Cola en passant par les cafés Grand-Mère essaient, avec succès la plupart du temps, d’imposer de nouvelles fêtes pour remplacer les saints patrons, sachant à quel point les jours de fête l’argent coule à flots d’autant plus qu’il est rare au quotidien.

Devenir créateur de son espace et de son temps ?  Une clé de la liberté. Vouloir maîtriser le temps et l’espace de l’autre ?  Une des définitions de la tyrannie.

Alors parcourons la marelle des jours de la semaine.

Lundi est le jour de la lune, celui où la plupart d’entre nous reprenons le travail ou l’école. La lune, servante du soleil ? La lune nous parle des humbles tâches du quotidien comme support de croissance personnelle et d’entretien de la vie : il faut planter les graines et couper les cheveux des femmes et les branches des arbres fruitiers selon les rythmes de la lune. Avez-vous déjà pris un coup de lune ? Moi oui. Et si pendant le jour, la lune se fait sage et canalise son énergie au service des autres, la nuit elle ne connaît plus que sa propre loi, celle de la folie, qui fait hurler les loups-garous et décoller des hordes de sorcières sur leurs balais magiques. Pour ceux qui dorment pendant la nuit, elle devient la maîtresse des rêves et des cauchemars. Ainsi va la lune, ainsi va la femme, vierge sage, vierge folle, palpitante et vivante, soumise aux marées mais faiseuse de tsunamis quand on la néglige trop. Ainsi la lune, gardienne de la nuit, fait référence au service souvent caché mais quotidien rempli par toutes ces femmes sans lesquelles le monde des hommes et ses jeux de pouvoir s’écroulerait comme un château de cartes. Car ce travail commence dans le ventre obscur de la mère.

Mardi est le jour de mars : bien nourris et remis en selle par le lundi, nous voilà prêts à relever tous les défis, à affronter tous les ennemis, à accomplir tous les projets. C’est le jour masculin par excellence, celui où il faut quitter le foyer, où les jupes de la mère se révèlent étouffantes ; le jour où il ne faut pas manquer l’école. Le jour dédié à la testostérone, à ses œuvres importantes, à sa liberté sauvage,  à ses excès coûteux, à sa violence débridée. Si vous vous sentez peu porté par les Ides de Mars, mieux vaut ne pas chercher le conflit ce jour-là ! Mars est un des rares Dieu à oser défier directement le pouvoir établi, celui de Jupiter, et à se révolter quand il ressent une injustice.

Mercredi arrive, porteur du caducée de Mercure : ce jour-là, les relations sont supérieures aux besoins du moi : c’est le jour des enfants, et celui des réseaux. C’est le jour où l’on prend soin les uns des autres, c’est donc le jour où les mères de famille, et de plus en plus les pères, sont souvent épuisés quand arrive le soir. C’est la mi-temps de la semaine. C’est le jour où l’on joue, ou l’on soigne, où l’on communique par-delà les conflits.

Jeudi, c’est Jupiter sur son trône, la planète qui veut se faire plus grosse que le soleil : c’est le jour des banquiers et des rentières, des actionnaires et des actionnés. Prenez le pouvoir, prenez votre place. Quand Jupiter s’écroule c’est le jeudi noir des crash boursiers.

Vendredi, Vénus nous ramène à l’intime, à l’art, à l’amour ou au plaisir. N’aimez-vous pas sortir le vendredi soir ? Regardez Vénus dans le ciel, si souvent accrochée au devant du croissant de lune comme un diamant au cou d’une belle de nuit. C’est le jour de la séduction. Au travail, l’approche du week-end rend l’ambiance plus légère. N’est-ce pas beau de terminer ainsi la semaine ?

Samedi est le jour de Saturne et le temps du Sabbat, le temps où l’on mesure le temps qui passe, le jour où l’on remet de l’ordre dans nos vies désorganisées par les excès des Dieux de la semaine. Plus beaucoup de sabbat et de remise en ordre intérieure pour nous les gens modernes ayant perdu la crainte des Dieux ; mais les contraintes de la vie transformées en plaisirs factices, les courses dans les supermarchés, les pubs de la télé et la dernière machine à la mode pour aider au ménage. Saturne nous apprend les limites imposées par la vie sociale et par la vie tout court. Qu’elle est vite dépensée, la paye du samedi ! Qu’elle est vite passée, la vie humaine ! C’est aussi le jour des bilans de conscience, le jour où l’on voit clair à l’intérieur, car le sabbat nous permet de voir cette autre lumière, en nous interdisant d’allumer la lumière extérieure. C’est ainsi que Saturne, en nous libérant du superflu, nous permet d’atteindre la joie profonde, la paix intérieure.

Et vient le Dimanche, le jour du soleil, réservé à la prière, à la famille, à la nature, au sport, à soi, en fonction de nos croyances et de notre style de vie. Un jour où dans notre civilisation et dans beaucoup d’autres, le travail est interdit.

Que ressentent ceux dont même ce jour n’est pas à l’abri de patrons tyranniques décidés à remplacer le soleil ?

Et chez vous, à qui appartient-il ce jour du soleil ?

Etes-vous sensible à l’ombre du dimanche soir, ombre d’autant plus forte que le soleil de midi a été lumineux ?

 

Passez quelques instants chaque matin à frapper dans les mains pour appeler le Dieu ou la déesse  du jour : peut-être ainsi vous protégera-t-il, mais surtout, vous apprendrez à mieux le connaître et votre journée n’en sera que meilleure !

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Marie, mouche-toi les cheveux ! …

par Marie-José SIBILLE

publié dans On peut choisir sa famille

… Ai-je dit à une de mes filles ce matin, dans le rush du départ à l’école. Evidemment, l’une reniflait, pendant que l’autre comptait ses nœuds devant la glace. Quant au troisième il contemplait, encore en pyjama, le passionnant atterrissage  d’une mouche sur la baie vitrée, sa tartine pendouillante à la main, pendant que son père était déjà en train de klaxonner dans la voiture.

Ah, cette rentrée des classes ! Ce rythme de l’école quatre jours (bientôt cinq ?) sur sept ! Comment y survivre ?

Si l’école n’existait pas, la plupart des conflits entre parents et enfants disparaîtraient, beaucoup de professionnels accompagnant les familles sont d’accord là-dessus. Et je suis confrontée à cette réalité quotidiennement, comme mère et comme thérapeute familiale.

Mais en même temps l’école fait tiers, défusionne, renvoie à une réalité sociale incontournable. Des enfants et des familles de tous genres, vivant des dynamiques d’attachement difficiles, ou des adolescences explosives, peuvent y trouver une respiration indispensable, en particulier grâce aux structures d’internat.

Ne parlons pas de toutes les familles maltraitantes et gravement disfonctionnelles : l’école (ou plus exactement la scolarisation) obligatoire permet à certains enseignants ou au CPE de lancer un signal d’alarme. Par ailleurs, l’école permet aux parents de souffler, en particulier les parents des milieux défavorisés  souvent débordés par leur travail, qui ont peu d’autres soutiens, et peu d’espoir pour leurs enfants de vivre autre chose.

Alors ne jetons pas tout de suite l’école avec le stress du lundi matin et la maîtresse acariâtre et psychorigide de la petite dernière. Les alternatives de scolarisation à la maison montrent aussi leurs limites au niveau de la construction psychique et relationnelle de l’enfant, mais aussi de l’ensemble de la famille et en particulier de la mère, même si l’idée est parfois très tentante.

Il y a bien sûr les écoles alternatives qui développent d’autres compétences, mais surtout qui considèrent l’enfant autrement que comme une gourde (!) à remplir avec les tables de multiplication et les règles de la grammaire française, au combien opaques pour les non passionnés. C’est ainsi que Montessori, Freinet, Steiner et d’autres, ainsi que la récente aventure des Amanins[1], l’école des « Colibris » avec Pierre Rabhi, une école « écologique », en lien avec les cycles de la nature, sont de bonnes opportunités pour ceux qui sont proches de ces lieux rares et précieux, et qui ont les moyens de financer une scolarité privée.

Mes enfants sont dans une école de village où l’absence de pression des grandes villes, le relativement faible nombre d’élèves dans les classes et la proximité de la Nature rendent certains obstacles plus simples à dépasser. D’autres, paradoxalement ceux liés au respect de la Nature, au transport, à la nourriture de la cantine, semblent au contraire plus compliqués. Pas de « pédibus » dans mon village, mais un troupeau de 4*4 à faire peur à n’importe quel rhinocéros et des bus aux moteurs diesel archaïques et mal réglés qui font immédiatement penser au prochain scandale sanitaire qui va se déclencher en France dans quelques années.

Reste une question terrible : les devoirs à la maison. Savez-vous que la loi les interdit en primaire ? Ils sont fatigants, inutiles, source d’inégalité entre les familles, de conflits entre parents et enfants, preuve de l’ingérence de l’école dans la famille alors que l’inverse n’est pas accepté … et encore une fois INUTILES ! De nombreux livres, blogs et articles rappellent cela. « Il faut que les enfants montrent à la maison ce qu’ils ont fait en classe, pas qu’ils montrent en classe ce qu’ils ont fait à la maison », nous dit par exemple l’auteur sur un  blog[2] inspiré de la pédagogie Freinet.

Alors combattons pour la liberté de respirer de nos enfants, et de nous-mêmes, en dehors de l’école. Certains enseignants sont convaincus, et ont renoncé à donner des devoirs, quitte à se bagarrer avec les parents !

Quant à mon fils, il est rentré hier en me disant : « Maman, ma maîtresse a fait des progrès ! Elle donne moins de devoirs que l’année dernière ! ».

L’argument majeur de certains enseignants adeptes des devoirs est ainsi que ce sont les parents eux-mêmes qui les demandent.

Précisons alors cette évidence : ce ne sont pas les enfants qui ont besoin des devoirs, mais les parents. Pourquoi ? Essentiellement par culpabilité et par peur de ne pas donner le meilleur pour leurs enfants bien sûr.

Et aussi certains enseignants, d’ailleurs souvent pour les mêmes raisons.

Mais aussi parfois pas incapacité à laisser leur élève s’échapper du cadre pour redevenir simplement un enfant …

Alors, chers parents anxieux et demandeurs de devoirs, apprenez à gérer vos angoisses et votre culpabilité, il y a des psys pour ça !

Mais déjà commencez par faire ce petit exercice :

Regardez autour de vous et prenez une dizaine de personnes, adultes confirmées, au hasard, mais pas dans les mêmes milieux ni classes sociales.

Prenez une feuille, et estimez sur une échelle de 1 à 10 :

-          Degré de bonheur familial : relations avec enfants, parents, vie de la famille au quotidien, … ?

-          Degré de bonheur affectif, quel que soit le choix de couple ou de célibat ?

-          Degré de santé physique et énergétique, vitalité ?

-          Degré d’épanouissement personnel : créativité, enthousiasme, sérénité ?

-          Degré d’appartenance et d’intégration sociale : trouver sa place, faire un métier qu’on aime, subvenir à ses besoins et à ceux des personnes qui dépendent de nous ?

-          Degré de capacité et d’intelligence relationnelle, expression des sentiments, communication, amitiés, … ?

-          Degré de citoyenneté, sentiment du vivre ensemble, respect des autres, de la nature, de la planète ?

Une fois que vous avez estimé tout cela, vous pouvez mettre aussi une note sur la place qu’a eu l’école, ou plus exactement la réussite scolaire à l’école, dans la construction de cette personne: vous trouverez sûrement dans votre « best of » des gens avec plein de diplômes, et d’autres qui ont arrêté l’école en 5ème, certains qui ont adoré les tableaux noirs et les cahiers de vacances, et d’autres qui ont préféré les radiateurs et la fenêtre au fond de la classe.

Vous trouverez aussi certains qui ont été « nuls » au primaire et « parfaits » au lycée, d’autres qui ont été « élèves modèles » à l’école et ont pété les plombs en troisième. Certains qui ont rencontré des enseignants passionnants et des maîtres à vivre, d’autres qui ont rencontré surtout des répétiteurs et des perroquets.

Je n’ai pas mis dans les critères de réussite celui de la richesse matérielle, le nombre de voitures inutiles, de télévisions dans chaque chambre et d’ordinateurs par personne, car je considère cela plutôt comme un poids. Mais même si vous tenez à ce critère, s’il est connoté positivement pour vous, vous verrez que les diplômes n’y sont pas pour grand-chose.

Certains aussi, ont pris le meilleur de l’apprentissage du vivre ensemble que représente souvent l’’école, sans pour autant réussir dans la forme d’apprentissage aujourd’hui proposée en France. Mais ils ont su utiliser cet autre savoir, ce savoir immanent que propose la collectivité éducative, pour trouver une place créative dans la société.

A un certain moment de notre parcours, toujours trop long, nous regardons l’herbe de l’autre côté de la clôture et la trouvons plus verte : une enseignante à la retraite me confiait qu’elle avait accumulé les diplômes comme une armure pour vaincre sa timidité et son manque de confiance en elle et qu’elle aurait mieux fait de se consacrer à la peinture. Elle a pourtant passé sa vie, comme la plupart d’entre nous, à essayer de convaincre les autres que son parcours était le bon. Et encore a-t-elle maintenant ce retour sur elle-même.

Alors nos enfants ?

Faisons confiance à l’évolution, à la vie, à l’humanité.

Laissons-les vivre.

 

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