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PRÉSERVER LA BIODIVERSITÉ, UN ENJEU HUMANISTE

par Claire Sibille

publié dans Cette société - c'est la notre ! , Ecothérapie , Malheureusement tout est vrai !

PRÉSERVER LA BIODIVERSITÉ, UN ENJEU HUMANISTE

Prologue du  recueil "Protégeons le Vivant !", vendu intégralement au profit de l'association de protection de la biodiversité Animal Cross.

Résumé :

La biodiversité disparaît dans un silence assourdissant, mais depuis longtemps des associations visionnaires comme Animal Cross luttent pour la préserver. Car les êtres vivants non humains, animaux et végétaux, ont besoin d’hommes et de femmes conscients et engagés à leur côté. Nous partageons un destin commun.Nous faisons partie du même monde, et le détruire c’est nous détruire. Il est essentiel de sortir du déni, et de comprendre le lien viscéral qui nous unit au Vivant non humain.

 

*******

 

En 1964, en Amérique, l’assassinat ultra-violent d’une jeune femme, Kitty, a bouleversé l’actualité. Pourquoi un tel écho populaire dans un pays qui compte des centaines d’homicides par million d’habitants ? Ce qui a créé un électrochoc dans la population - et chez les psychologues qui ont étudié la question - c’est que pas moins de 38 voisins ont assisté au crime depuis leur fenêtre pendant plus d’une demi-heure, et aucun n’a réagi. Ils pensaient que l’autre ferait le boulot, ou, comme le justifie un de ces témoins : je n’ai rien fait parce que ma femme m’a dit de ne pas me mêler de ce qui ne me regarde pas.

Le « syndrome Kitty Génovèse » ou « bystander effect » - assister à un événement sans s’impliquer - était né. Les chercheurs ont constaté que plus le nombre de témoins est important, plus le « bystander effect » s’applique. Ainsi, si vous êtes seul sur un chemin de montagne et croisez une personne en difficulté, il y a de fortes chances que vous réagissiez, sauf à être psychopathe. Mais une voiture en détresse sur le bas-côté alors que vous êtes dans une file ininterrompue ? Quelqu’un a sûrement déjà appelé les secours…

Alors quand presque huit milliards d’individus assistent plus ou moins passivement à la destruction de la biodiversité par quelques milliers d’autres, le « bystander effect » agit à plein.

Mais au cas où vous échapperiez au premier, il existe un autre syndrome paralysant. Celui du témoin impuissant. Celui-là s’enracine dans toutes les fois où vous avez assisté, petit, aux disputes entre vos parents, à la maladie ou à la mort d’un proche, à toutes sortes d’événements traumatiques. Le témoin impuissant a 4 ans, même s’il en a cinquante, et regarde Papa frapper Maman, ou tout autre événement traumatique, sans pouvoir intervenir. Il est sidéré. Paralysé. Et facilement amnésique, car il utilise la protection du déni pour continuer à vivre. Voire à survivre.

Les 15000 morts de la canicule 2022 en Europe, bilan encore très incomplet donné par l’OMS, et combien de millions d’animaux, et combien de millions d’arbres, sont ainsi rapidement oubliés, car nous devons tenir le coup et continuer tous les matins à prendre la voiture pour aller nourrir nos enfants.

Mais si nous voulons survivre, il faut changer notre rapport au vivant, comprendre son unité complexe et multiforme, sortir de l’illusion de la séparativité avec ses conséquences dramatiques en termes d’exploitation et de destruction.

Beaucoup l’ont déjà compris pour la diversité humaine. Nous ne sommes qu’une humanité quelle que soit la couleur de notre peau. Il est temps d’appliquer cette conscience aux êtres sensibles non humains. Nous ne sommes qu’un Être vivant aux multiples facettes. C’est la richesse de cette diversité qui rend la résilience possible.

Aujourd’hui la biodiversité est enfin à l’ordre du jour. Impossible d’allumer la radio sans en entendre parler. Elle suit l’autoroute ouverte par le changement climatique, dont les conséquences dramatiques sur l’humanité sont plus perceptibles que la disparition d’un oiseau en Europe ou d’une grenouille en Amazonie.

Antonio Guttérès, le secrétaire général de l’ONU, a ouvert la COP 27 avec des mots très forts, parlant même de suicide collectif. Les militants du climat sont parfois dépeints comme de dangereux radicaux, alors que les véritables dangereux radicaux sont les pays qui augmentent la production de combustibles fossiles, a-t-il osé dire face aux gouvernants du monde entier.

De nombreux penseurs, philosophes, anthropologues[1], éthologues comme Sophie Gosselin[2] ou Franz de Vaal[3] proposent de nouvelles visions du monde, paradoxalement proches de celles des peuples premiers. Nous sommes la Nature qui souffre, disent-ils tous, chacun dans leur langage. Sortons de la pensée cartésienne qui nous a coupés de l’Univers dans un but utilitariste. Retrouvons l’empathie, le lien avec le Vivant qui nous traverse. Retrouvons cette ancienne mentalité, proche de l’animisme, devenue aujourd’hui ré-évolutionnaire.

La planète nous survivra. Elle est par nature résiliente. Des mouches arrivent à se développer au-dessus des vapeurs de pétrole, des scorpions et des araignées sont revenus coloniser les décombres d’Hiroshima au milieu des radiations. Mais attaquer chaque jour cette corne d’abondance nous fait perdre notre humanité, de la même façon qu’un enfant qui continue à maltraiter les animaux après avoir grandi montre qu’il n’a pas su adoucir la cruauté paradoxale de l’innocence par le développement de la conscience et de l’empathie. C’est en général un très mauvais signe…

Le recueil que vous tenez entre les mains est né dans le besoin et l’urgence d’agir, de sortir de l’impuissance, dans un été où la Nature exprimait sans discontinuer sa souffrance et les limites de sa tolérance, y compris dans les zones de notre planète qui peuvent paraître le plus protégées. 

Soutenir une association dont les moyens d’action au profit de la biodiversité sont avérés semblait le plus efficace. Car pendant tout ce temps, ce temps où nous avons regardé ailleurs pendant que la maison brûlait avec les plus fragiles de ses habitants, figés dans l’un ou l’autre des syndromes décrits plus hauts ou tout simplement indifférents, inconscients, trop pris par la vie quotidienne, des voix ne se sont jamais tues.

Et, parmi elles, celles des associations comme Animal Cross, auxquels les bénéfices de ce livre sont entièrement reversés.

Les auteurs de cet ouvrage ont leurs propres motivations pour agir. Ils les présentent, ainsi qu’eux-mêmes, à la fin de chaque contribution.

Mais chacune, chacun, a répondu présent pour ce projet collectif, et ce n’est pas la moindre des qualités de ce livre de réunir des artistes d’origine et d’expression si différentes.

Merci à elles et eux d’avoir participé à cette aventure collective. Merci aux lecteurs de leur donner raison d’avoir consacré à ce livre un temps de création.

Car la fiction peut apporter à l’écologie de nouveaux imaginaires, différents et complémentaires de ceux amenés par les sciences et les discours politiques.

 

Claire Sibille, coordinatrice du recueil

 

 

[1] Voir bibliographie et filmographie en fin d’ouvrage.

[2] Sophie Gosselin philosophe, membre du comité de rédaction de la revue Terrestre, co-autrice de La condition terrestre, habiter la Terre en communs, éditions du Seuil, collection Anthropocène, octobre 2022.

[3] Franz de Vaal, éthologue, L’âge de l’empathie, LLL, 2010.

Qui est Claire ?

 

Écrivaine, Psychothérapeute[1], je vis dans le Sud-Ouest de la France, au cœur de la nature, au milieu d’une forêt, lieu propice tant à la guérison des blessures qu’à l’inspiration. J’y ai vu grandir mes enfants, et le temps libéré par leur envol me permet de m’impliquer encore davantage, non seulement dans l’écriture, mais aussi dans mes deux combats fondamentaux : l’écologie et le féminisme. Ils sont d’ailleurs intimement reliés dans une pensée et une pratique : l’Écoféminisme. J’adhère sans réserve à cette vision du monde, et m’emploie à la vivre au mieux, au côté d’un compagnon qui partage ces engagements.

Dernières parutions :

Juste un (très) mauvais moment à passer, BOD, 2022. Recueil de nouvelles sur les traumatismes de l’enfance.

Inventaires, Novice, 2022, roman. Prix du roman non publié.

https://www.clairesibille.fr/2023/02/bibliographie-claire-sibille.html

 

Pourquoi a-t-elle participé à ce recueil ?

Mes parents ont fait partie des 100 premiers adhérents au Parti écologiste en France. On était dans les années 70, il fallait protéger les vautours et les gypaètes Barbus, il était question du retour des ours dans les Pyrénées, on commençait à camper au col d’Orgambidesca en période de migration des oiseaux pour protéger les palombes. Nous aidions à nourrir les alors rares vautours fauves, je me rappelle leurs grosses pattes et leur énorme bec, impressionnants pour la petite fille que j’étais. Mais très drôles aussi. Les chasseurs maladroits amenaient à mes parents leurs animaux blessés, des militaires et des touristes les « NAC[2] » ramenés sur un coup de tête et dont ils ne savaient plus quoi faire … On a eu de tout à la maison, un refuge de faune sauvage avant qu’ils ne se multiplient, des fennecs aux mangoustes en passant par les buses et les serpents, les hérissons et les chouettes, les araignées et les scorpions en pleine activité reproductrice.

C’est ainsi que chaque agression que subit la biodiversité, et elles sont innombrables aujourd’hui, blesse non seulement la femme que je suis mais la petite fille que j’étais. Alors, pour elles deux, je me suis lancée dans cette aventure de coordonner un recueil collectif au profit d’une association en laquelle j’ai confiance, Animal Cross.

https://www.instagram.com/clairesibilleecrivaine/

 

[1] Écothérapie, art-thérapie, ateliers d’écriture thérapeutique, EMDR.

[2] NAC : nouvel animal de compagnie, depuis les pythons jusqu’aux poules, en passant par les tortues et les singes…

Le livre est disponible partout, en ligne ou dans votre librairie sur commande, et localement à l'Escapade à Oloron et à l'Escampette à Pau. Une présentation de l'ouvrage a lieu mercredi 26 avril à 18h30 à Pau, à la librairie l'Escampette.

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