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PISSER DEBOUT !

par Claire Sibille

publié dans Alterégales

PISSER DEBOUT !

Une manière simple de déconstruire le patriarcat à l'attention des femmes courageuses

   S’il y a un symbole du masculinisme triomphant, c’est bien celui-là ! Un homme qui pisse, glorieux, au bord de la route, sur un parking ou simplement sur le bas-côté, feux de détresse allumés, se fichant pas mal des voitures qui passent et des coups d’œil – curieux, exaspérés, agacés, choqués - des femmes et des enfants…

   Je dis masculinisme et pas masculinité car je fais partie de ces femmes qui ont pu s’entourer d’hommes « déconstruits », comme on dit aujourd’hui, après de multiples essais-erreurs-traumatismes qui nourrissent mes nouvelles et romans, merci ! Ce genre d’homme va se garer sur un parking, cherche des toilettes publiques, et, s’il n’y en a pas, s’isole dans la campagne pour satisfaire son légitime besoin, comme nous les femmes, sans se sentir pour autant diminué.

   Mais pourquoi ne pas déconstruire aussi le féminin ? Non pas dans ses ressources profondes et si nécessaires aujourd'hui encore plus qu'hier, mais dans ce qui ne lui appartient pas ? Dans ce qui lui a été collé dessus par des millénaires de culture patriarcale ? Par exemple la difficulté de l’accès à la colère, l’affirmation de la légitimité de son besoin, de son désir, la capacité à prendre soin de soi avant de s’occuper des autres ?

   Pisser debout ? Je ne cherche pas à révolutionner l’usage des toilettes, pour ça je préfère faire la promo des toilettes sèches, voir mon article sur le sujet.

   Mais pisser débout :

  1. C’est jouissif. Essayez si ce n’est déjà fait, vous verrez, de préférence dans la nature, ou sous la douche mais quand l’eau ne coule pas sinon c’est de la triche.
  2. Ça libère de la dopamine qui vous fera attaquer la journée de manière « virile ». Allez, encore un peu d’étymologie. Viril, ne signifie pas seulement masculin, mais surtout la force et le courage, qualités considérées depuis l'Antiquité comme propres au « mâle humain » (Dictionnaire historique de la langue française, Alain Rey). Pourquoi alors ne pas se les approprier ?
  3. Certes, s'accroupir est aussi une posture jouissive, je réponds tout de suite à cette intelligente remarque, et très adaptée, par exemple pour l'accouchement. Mais justement, nous avons la chance de pouvoir faire les deux, en fonction du moment, et de notre désir ! Vive la complexité féminine.
  4. S’accroupir, c’est à nouveau se mettre en position basse pour accomplir nos besoins les plus primaires. D’un côté la fierté, de l’autre la honte. Si vous avez eu des enfants de sexes différents, vous avez dû, lors des longs voyages, vous rendre compte de la différence. Chercher le bon petit coin, suffisamment caché, pour que vos filles puissent se soulager, s’arrêter 10 secondes sur le bas-côté pour que vos fils fassent de même. Sans aucune injonction parentale, donc la culture est forte, et difficile à contrecarrer.

   Cette idée de position basse me rappelle une scène récente lors d’une dédicace, une parmi des milliers de situations identiques. La femme voulait acheter mon livre et se tournait vers l’homme, droit dans ses bottes, regard tourné vers l’horizon, les bras croisés. Elle avait un sourire séducteur et apaisant, un regard entièrement tourné vers lui, « ça ne te dérange pas que je l’achète, je pourrais aussi le faire lire à ta mère ? ». Dans sa grande bonté, l’homme a accepté, sans une parole, avec juste un petit hochement de tête. C’était un couple banal et éduqué, pas le genre sur lequel on projette burkas et autres formes de violences faites aux femmes. Il ne la frappait sans doute pas tous les soirs en rentrant du bistrot, quoiqu’on ne sache jamais. C’était un couple banal, comme vous et moi, ayant totalement internalisé les schémas relationnels patriarcaux de base. Tristesse. J’ai espéré un instant que mon livre lui donne le courage de vivre son destin de femme.

   Alors une ordonnance simple et thérapeutique, mes sœurs, pissez debout !

 

 

 

 

Tout est dit ! Mais merci quand même à Bruxelles d'avoir construit la version féminine de sa statue iconique.Tout est dit ! Mais merci quand même à Bruxelles d'avoir construit la version féminine de sa statue iconique.

Tout est dit ! Mais merci quand même à Bruxelles d'avoir construit la version féminine de sa statue iconique.

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