Je suis psy … mais je vote !
Je suis psy … mais je vote !
Je ne vous dirai pas pour qui je vais voter : il y a des évidences inutiles à rabâcher et des nuances qui ne concernent que moi.
Je ne vous abreuverai pas non plus de conseils, cette prise de pouvoir bienveillante parfois lourdement teintée de condescendance et de jugement, masqués sous le sourire carnassier ou le soupir fatigué de l’expert. Le rappel de ce que j’ai pu ressentir aux prises avec la condescendance sous prétexte de soutien, m’est une barrière suffisamment solide pour ne pas vous infliger cela, même au corps et âme consentants de certains.
Alors j’aimerai plutôt partager les pensées qui m’habitent depuis plusieurs mois autour de cet enjeu de nos prochaines élections.
Par exemple se demander déjà si l’enjeu est aussi important qu’il en a l’air.
Vous savez, ce petit vertige qui nous prend à nous éloigner en pensée de notre pays pour voir l’humanité comme un unique organisme qui grandit, évolue, se transforme, dans une tourmente énergétique et émotionnelle qui annonce la naissance d’un géant. Ou son avortement.
Ou encore se dire que dans cette grande école à ciel ouvert, avec sa cour de récréation mais aussi ses apprentissages fondamentaux, que constitue notre vie politique commune, nous avons peut-être suffisamment évolué pour entendre de multiples voix, pour avoir moins besoin de leader paternaliste tout puissant pour nous dire quoi faire et de quoi avoir peur ?
Dans ce cas, nous n’aurions pas à faire face aux questions suivantes.
Et la première d’entre elles, où sont les femmes ?
C’est une des questions récurrentes qui montre à quel point notre pays n’est pas prêt à une démocratie plus circulaire et moins pyramidale. Une démocratie où nous laverions tous ensemble le linge sale de la planète et de notre pays, en chantant et riant autour du lavoir, plutôt qu’une société où tout le monde continue à suivre comme un seul homme un chevalier solitaire chargeant sur le champ de bataille sans souci des plus fragiles, des champs de blé parsemés de coquelicots, des nids de petites bêtes écrasés sous ses pas.
La seule femme envisageable nourrirait à elle toute seule, et a certainement déjà nourri je n’ai fait aucune recherche, nombre d’articles psychanalytiques pointus sur l’absorption du phallus paternel, ou nombre d’essais éthologiques sur la nécessité pour la femelle dominante de détruire et soumettre toutes les autres femmes susceptibles de tenter le spermatozoïde du mâle alpha.
Elle n’est donc pas très crédible en ce qui concerne l’éventuelle évolution des systèmes de pouvoir en place depuis quelques millénaires …
Et les hommes les moins belliqueux, les plus circulaires, disparaissent vite dans les arrière-gardes des combats impossibles en se faisant traiter de doux rêveurs ou d’idéalistes irresponsables.
Alors évolution peut-être, mais révolution pas encore.
Les femmes continuent d’apparaître comme les secrétaires, les muses ou les égéries plus ou moins bien inspirées de l’homme, celui qui continue de brandir le sceptre du pouvoir, le vrai, y compris par fille interposée.
Cette question va de pair avec celle de savoir si l’empathie envers les plus fragiles, la bienveillance et la reconnaissance envers la planète, la solidarité voire même l'amitié avec les différents, sont des valeurs qui vont un jour dépasser les voeux pieux et les déclarations d’intention. Je parle ici non pas de la société civile et de sa lente et encore marginale évolution, mais bien de l’organisation des pouvoirs dans la réalité quotidienne.
Donner le pouvoir aux empathiques, c’est donner le pouvoir à ceux qui mettent les plus fragiles devant, comme dans les meutes de loups, et pas loin derrière et en dessous, comme dans ces pyramides invisibles mais bien réelles dans lesquelles nous vivons plus encore que dans notre appartement du centre ville ou notre pavillon de banlieue.
Choisir l’empathie c’est écouter d’abord ceux qui savent partir d’eux et de leurs émotions, plutôt que ceux qui se réfugient derrière l’évidence de la raison, ceux qui reconnaissent les blessures de leur histoire et n’en rendent pas les autres responsables, ceux qui protègent d’abord ceux qui prennent soin des plus faibles, en nommant cette capacité la plus évoluée de notre cerveau comme une clé essentielle de notre survie et de notre évolution.
Choisir l'empathie, c'est donner la responsabilité du pouvoir à ceux qui maîtrisent leurs pulsions agressives parce qu'ils en ont conscience, au lieu de les laisser nourrir des relations et des décisions toxiques.
Choisir l’empathie, c’est déjà difficile en famille.
C’est déjà difficile dans le couple.
C’est déjà difficile avec nos propres enfants, avec nos vieux parents.
Alors dans une société, tu rêves ou quoi ?
Alors il vaut mieux couper les vivres aux plus fragiles, en espérant qu’ils disparaissent d’eux-mêmes faute de soins adéquats ?
Il vaut mieux privilégier encore et toujours la loi du supposé plus fort, en imaginant que sa sueur héroïque retombera, nourricière, sur les plus faibles qui en sont avides ?
Il vaut apparemment mieux continuer à croire en ce qui n’a jamais marché, sauf pour quelques super prédateurs ?
Mais l'histoire nous rattrape heureusement.
Et le plus fort, c’est au final le météorite qui a exterminé les dinosaures.
Et sous leurs grands pieds de géants sympas mais très maladroits, sous les grandes gueules pleines de dents de leurs méchants cousins tyrannosaures, se cachaient les graines de petites bestioles improbables ressemblant à des souris asthmatiques … nos ancêtres !