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le quotidien c'est pas banal

Laver ou ne pas laver sa voiture ? Mise à jour 2019.

par Marie-José SIBILLE

publié dans Cette société - c'est la notre ! , Le quotidien c'est pas banal

Laver ou ne pas laver sa voiture ?

Juillet 2019 

 

Une des nombreuses questions essentielles et existentielles qui se posent à l'Homo Ecologicus 2019.

Je l'ai déjà abordée en 2010, voir ci-après le dessin.

La vieille voiture de cette année-là est bien morte.

La nouvelle malheureusement indispensable ne nous a pas fait changer d'avis sur le sujet.

Nous fantasmons sur une roulotte tirée par nos deux ânes, un vélo électrique en plus du scooter déjà acquis, le vélo pur et dur est au-dessus de mes forces dans les vallons où nous habitons. Un char à vent et à pluie, une mini-montgolfière, une voiture solaire, ou tout simplement avoir le temps de tout faire à pied ... Ou encore l'invention par un savant fou de la téléportation, bien plus utile que les clones qui se multiplient ici et là dans le monde, comme si nous n'étions pas déjà assez nombreux.

En attendant ces fruits de l'intelligence humaine, la voiture transporteuse d'ados et de courses est belle et bien là, il faut l'assumer. Mais pas la laver ! Sauf à l'éponge et eau de pluie éventuellement. 

Quelques évènements m'ont poussée à reprendre ce thème typique de l'utilisation délirante de l'eau potable.

D'abord le choc de voir encore une fois la queue, en pleine canicule, devant l'énorme éléphant bleu qui m’invite cordialement à venir sous sa trompe faire laver ma voiture.

À côté de lui s'est opportunément installé depuis 2010 un vendeur de pizzas, preuve s'il en est de l'affluence attendue sous les rouleaux décapants. Pile le temps de faire cuire votre pizza, la voiture ressort toute belle.  

La radio hurle alertes canicule et sécheresse, et des hommes  dépensent des trombes d'eau potable pour ... ?

Dans la foulée, la radio mentionne les paquets de paille en plastique à usage unique vendus par Donald Trump pour financer sa campagne présidentielle. Et des êtres humains les achètent. En plus juste au moment où l'Europe les déclare écocidaires. "Fuck" les écolos européens. Excusez-moi, ça passe mieux en anglais. Et peut-être n'y a-t-il même pas pensé, évitons la parano.

Mais en attendant, c'est VRAIMENT le monde dans lequel je vis et pas un mauvais trip dû à un produit phytosanitaire que j'aurais ingéré par erreur.

Je me couche donc sur le capot et j'essaie d'attaquer la descente tranquillement. Car la haine m'a prise aux entrailles pendant une très très longue seconde, je ne vous le cache pas.

Surtout épargnez-moi les bons conseils du style "mais arrête donc d'écouter la radio" ! J'ai fait le choix de ne pas totalement me couper de l'actualité, tout en me préservant de longues périodes sans. Cet entre-deux frontière me convient bien tant la tentation du déni est le propre de l'Homme.

Respiration ventrale, contact avec la nature, chaleur humaine des personnes qui m'entourent, expression créative, j'ai survécu encore une fois.

Sans laver ma voiture. 

 

 

 

Dessin issu du site ci-dessous

Dessin issu du site ci-dessous

Laver ou ne pas laver sa voiture, telle est une des nombreuses questions

Version du 4/02/2010

 

Quand j’accepte de quitter mon coin de nature, je passe devant quelques officines qui m’interrogent, assez agressivement pour tout dire. L’une en particulier : un énorme éléphant bleu m’invite cordialement à venir sous sa trompe faire laver ma voiture. A voir le nombre de personnes qui attendent leur tour, je sens le doute m’envahir. Et si je loupais quelque chose ?

Evidemment j’ai un argument massue à faire valoir à ceux qui pourraient me suggérer d’aller au moins faire un tour pour voir : utiliser quelques centaines de litres d’eau potable pour faire briller ma vieille carriole, jusqu’à la prochaine pluie, c’est-à-dire une moyenne de deux heures au plus dans ce Béarn où j’habite, me laisse perplexe. Me vient immédiatement à l’esprit l’image d’un éthiopien, cherchant à s’abreuver avec une paille, couché contre un marigot, et j’hésite.

Mais.

Il paraît que la consommation d’eau potable chez moi n’a rien à voir avec le marigot de l’éthiopien. Je veux bien l’admettre, je n’ai pas suffisamment bûché la question pour argumenter scientifiquement,c’est-à-dire bien sûr de manière rationnelle. Donc il s’agit juste d’un problème moral, d’un conflit entre moi et moi, une incompatibilité d’images intérieures.

Poursuivons.

Ma voiture vit à la campagne, et si nous avons construit des étables pour les ânes, des cabanes pour les chèvres et des niches pour les chiens, ainsi que nichoirs et mangeoires pour les petits oiseaux, il ne nous est jamais venu à l’idée de construire un garage. J’exagère. Cela nous est venu à l’idée, enfin à mon mari, mais cette idée n’a jamais descendu les multiples couches, de plus en plus denses, de plus en plus résistantes, nécessaires à l’incarnation.

Elle vit donc dehors, quel que soit le temps. Telle un vieux sanglier, elle aime particulièrement les bains de boue, très efficaces contre les parasites et les manifestations viriles et humides de nos chiens ; et puis s’ébrouer en grognant de plaisir, en dévalant le chemin cahotant qui nous relie à la vie sociale. Bon an mal an, elle a acquis une hygiène particulière mais réelle ; vous savez sûrement qu’il vaut mieux ne pas commencer à laver un animal, ça le fragilise et vous serez obligés de vous y recoller régulièrement. En laissant faire la nature, vous verrez que la capacité autonettoyante de la vie est très au point. Malheureusement, j’ai commencé mes bains à un âge où je ne pouvais affirmer cette position avec assez de force pour être entendue, et je suis depuis vouée à la douche quotidienne.

En plus du conflit moral, je viens donc d’identifier que m’habite l’esprit de revanche.

Pour en finir avec ces interrogations torturantes : dans la semaine, ma carriole a accueilli trois enfants en bas âge et leur goûter, deux bottes de paille pour les chèvres, une visite au vétérinaire pour mon gros chien poilu, un tas de bois à remonter pour le chauffage. Enfin, la rupture d’un sac de farine le jour du ravitaillement mensuel a permis de sabler l’ensemble ; j’ai terminé le ménage avec la paille qui restait des chèvres, c’est efficace.

Quand j’irai à Paris recevoir les lauriers pour le futur livre que j’éditerai bien un jour, je n’irai pas avec ma vieille carriole.

En plus du conflit moral, et de l’esprit de revanche, me voilà embarquée dans la pente si facile des plus hautes trahisons.

  

  

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